La basilique du Sacré-Cœur de Montmartre

Conseils de rentrée

Les vacances sont terminées. La rentrée s’annonce très chargée. Le rythme de nos activités va s’accélérer au risque de nous faire perdre l’essentiel : Dieu. Lui seul peut nous rassasier puisque nous sommes faits pour Lui. Il est à craindre que le Seigneur puisse dire, à nouveau, plein de compassion : « Ils m’ont abandonné, Moi la Source d’eau vive, pour se creuser des citernes lézardées » (Jr 2, 13). Quelques conseils de vie spirituelle pour la rentrée…

Dans sa France contre les robots, Georges Bernanos a ce trait prophétique : « On ne comprend absolument rien à la civilisation moderne si l’on n’admet pas d’abord qu’elle est une conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure. » Des bien-pensants diront que cette phrase est excessive… Ils ont tort. Certes, la civilisation moderne n’est pas un être conscient et « complotiste » qui aurait décidé de combattre notre vie spirituelle, cependant il suffit d’observer honnêtement nos journées et notre rythme de vie pour admettre que Bernanos avait fondamentalement raison. Mon « smartphone », les réseaux sociaux, internet, les appels téléphoniques, les transports en commun : tout est bruyant, accaparant, chronophage, et stressant. Il semble que tout soit fait pour me maintenir à l’extérieur de moi-même, et surtout en dehors de toute relation personnelle avec ce Dieu qui est « plus intime que l’intime de moi-même » selon la belle expression de saint Augustin. Or, comme en fait la découverte le petit novice bénédictin Placide de Mère Geneviève Gallois (cf. La vie du petit saint Placide, Éditions du Cloître) : « la vie intérieure est… une vie qui est intérieure ! » Elle demande de l’intériorité donc du silence, de l’attention et du temps.

DU TEMPS
En réalité nous avons besoin d’une « règle de vie ». Pour ne pas se laisser dévorer par l’activisme que suggère le diable afin de nous éloigner de Dieu, il nous faut absolument un emploi du temps extrêmement précis. Les moines ont la sagesse d’adopter ce moyen depuis des siècles : à nous d’en faire autant dans le monde. Pour cela, écoutons le conseil africain donné par le cardinal Sarah dans son ouvrage Dieu ou rien (Fayard, 2015) : si nous voulons remplir pleinement un vase, il faut commencer par y mettre les gros cailloux, puis des plus petits, puis du sable. Et ne pas procéder dans le sens inverse. Sinon nous n’aurons rempli notre vie qu’avec du sable… Nous aurons construit notre vie sur du sable : la ruine et l’écroulement ne seront pas loin. Il en est de même dans notre « règle de vie » : mettons d’abord le plus important, c’est-à-dire la prière sous toutes ses formes (prière du matin, du soir, méditation, oraison, lectio divina, chapelet, et surtout la messe si notre devoir d’état et nos conditions de vie nous le permettent). Après avoir placé la prière (peut-être en partie pendant nos temps de transport), nous pouvons y mettre des cailloux moins importants mais indispensables : du temps pour notre famille, pour notre prochain et pour nous.

DE L’ATTENTION
Nous faisons attention à nos « sms » et à nos mails de façon parfois compulsive et pathologique. Je ne sais combien de fois par jour. Nous lisons beaucoup d’informations (journaux, blogs, sites) mais presque jamais la Parole de Dieu. Léon Bloy disait pourtant, avec raison : « Quand je veux savoir les dernières nouvelles, je lis saint Paul. » Puissions-nous passer plus de temps à lire la Parole de Dieu (reçue quotidiennement par courriel) que je ne sais quel autre site sur internet. Ne vivons pas à l’extérieur de nous-mêmes mais ayons une vie spirituelle : une vie de l’âme avec Dieu, une vie théologale. Une vie de relation avec Dieu. Faisons attention à sa présence en nous par la grâce. Nous sommes devenus, par le baptême, les temples vivants de la Sainte Trinité (cf. 1 Co 3, 16) : rendons-nous présents à ce Dieu qui est présent en nous.

DU SILENCE
Pourquoi ne pas mettre notre téléphone sur silencieux pendant plusieurs minutes ? Pourquoi ne pas nous servir de l’alarme de notre téléphone pour chronométrer notre temps journalier d’oraison avec le Seigneur ? L’oraison c’est ce « commerce intime d’amitié où l’on s’entretient souvent seul et seul avec ce Dieu dont on se sait aimé » (sainte Thérèse d’Avila). C’est ce temps que l’on rend au Seigneur pour être à Lui, pour être avec Lui, pour L’aimer dans le silence de notre cœur ou dans le silence d’une église où nous nous sommes postés devant le tabernacle. « La prière ne se réduit pas au jaillissement spontané d’une impulsion intérieure : pour prier, il faut le vouloir » (CEC 2650). Il faut prendre le temps de prier et il faut faire cesser le bruit extérieur et intérieur. C’est la « force du silence » ! En cette rentrée, recueillons la leçon de vie du frère Vincent de l’abbaye de Lagrasse et du cardinal Sarah, et entendons l’avertissement de saint Alfonse de Liguori : « Qui prie, se sauve certainement ; qui ne prie pas se damne certainement. » Arrêtons de lire cet article, organisons notre « règle de vie » et prions !

Abbé Laurent Spriet

© LA NEF n°295 Septembre 2017