Cinéma Juin 2025

Les musiciens

7 mai 2025

À la tête de la fondation léguée par son père, richissime mélomane, Astrid Thompson (Valérie Donzelli) décide d’acheter le quatrième Stradivarius qui permettrait d’exécuter le quatuor commandé par son père à Charlie Baumont. Les musiciens, d‘excellents comédiens de surcroît instrumentistes, se réunissent dans le château familial. Les répétitions se révèlent catastrophiques, le choc de ces ego surdimensionnés empêchant l’entente musicale. Astrid décide alors de faire venir Charlie Baumont, seul capable de créer l’unité.
Cette comédie très française de Grégory Magne (Les Parfums), ravira les musiciens et les mélomanes par son ambiance très authentique de travail musical, où ils retrouveront le monde qu’ils aiment. Mais elle s’adresse d’abord au grand public, qui s’y régalera d’une savoureuse étude de caractères, riche de psychologie et d’humour, où le sentiment tient sa juste place. Chaque soliste est peint avec justesse, y compris le mouton noir du groupe, une violoniste qui n’a pas le pedigree des autres mais qui a été choisie à l’oreille par Astrid. Virtuose sortie du rang, elle a un comportement de fille du peuple absolument désarmant.
Bémol dans cette composition majeure, après l’excellente musique des répétitions, le concert final, qui se voulait sans doute extatique, nous a paru au contraire barbant.

Partir un jour

13 mai

Au moment d’ouvrir son restaurant gastronomique à Paris, Amélie (Juliette Armanet) doit retourner en province chez ses parents : son père a eu un infarctus. Dans cette France périphérique sans grâce, en bord de nationale, elle retrouve non seulement ses parents, mais aussi ses amis d’enfance et notamment son ancien petit ami (Bastien Bouillon). Elle a un autre souci : elle est enceinte de son associé, à qui elle ne l’a pas dit.
C’est le premier film d’Amélie Bonnin qui a eu l’étonnant honneur d’ouvrir le festival de Cannes. L’originalité du film est d’insérer dans les dialogues des extraits de chansons des années 1990-2000. Les acteurs chantent vraiment, dans le fil du tournage. Tous ne sont pas chanteurs mais cela donne son charme au film. Juliette Armanet, vraie chanteuse elle, se révèle très juste comédienne. La chanson du titre, du boys band 2Be3, dit le thème : il faut partir un jour. Pour Juliette, partir de Paris, puis partir à nouveau pour rejoindre la vraie vie. Le film accumule les éloges, qui saluent sa délicatesse de ton et son ancrage populaire mais tous esquivent le cœur du film : le choix d’Amélie d’avorter et son silence face au père. La scène où celui-ci apprend enfin est d’une force dramatique rare. Juliette lui rappelle que tous deux ne voulaient pas d’enfants, mais lui réplique que ce qu’on dit dans l’inconscience n’est pas ce qu’on pense face à la réalité. Vrai dilemme, vrai drame, vrai film. Ce dernier ne dit pas quelle sera l’issue, il suggère simplement ce que serait un vrai choix.

François Maximin

© La Nef n° 381 Juin 2025