Cinéma Janvier 2025

L’espion de Dieu

(22 janvier 2025)

Réalisateur discret, Todd Komarnicki est plutôt connu comme scénariste (notamment de Sully avec Clint Eastwood), mais il joint ces deux talents pour l’excellent Bonhoeffer (titre original) que nos amis de Saje offrent aujourd’hui sous le titre (déjà utilisé ailleurs) de L’Espion de Dieu. C’est un biopic particulièrement profond et prenant sur le pasteur Dietrich Bonhoeffer (1906-1945), théologien réputé, héros de la résistance au nazisme et martyr.
Si l’on s’étonne qu’un homme d’une telle envergure ait si tardivement intéressé le cinéma, alors que sa vie multiple et éclatante l’appelait, on se réjouit de voir combien l’attente a été fructueuse car le film est à la hauteur de son sujet. Avec de bons acteurs : Jonas Dassler en Bonhoeffer et August Diehl (déjà anti nazi dans Une vie cachée de Malick) dans le rôle de son ami Martin Niemöller ; avec une photographie bellement ombreuse et une réalisation tendue, on avance à la suite de Bonhoeffer dans son chemin d’incroyable courage, soutenu par une réflexion spirituelle dont les dialogues dévoilent l’excellence.
Parce que les élections allemandes à l’époque hitlérienne montrent que la résistance au nazisme fut plus grande dans les Länder catholiques, on méconnaît la lutte de nombre de protestants contre le Führer, notamment « l’Église confessante » où Bonhoeffer s’engagea fortement. Celui-ci finalement, dans un déchirement moral extrême, accepta de participer à un attentat contre Hitler, ce que le film évoque avec un suspense sobre et âpre. Avant la fin en martyr, où le noir et le silence témoignent qu’une chute peut être une apothéose.

Marie

(Netflix)

Belle surprise, le film le plus regardé de Netflix est consacré à la Sainte Vierge ! Marie, de l’Américain D.J. Caruso n’a guère de concurrents car, hormis Marie de Nazareth de Jean Delannoy (1995), la Madone n’est apparue à l’écran que dans des documentaires ou des téléfilms.
Ici, il s’agit de vrai cinéma, hollywoodien, avec grands acteurs, grands décors, grande musique et grands costumes. Pour ces derniers, il s’agit surtout de la cour d’Hérode et des grands prêtres, aux couvre-chefs baroques. Malgré des libertés de scénario prévisibles et les approximations de ses dialogues, Marie s’orne de notes sérieuses historiquement et respectueuses religieusement. Le meilleur acteur du film reste sa seule star, Anthony Hopkins, qui fait en Hérode un numéro de méchant si extraordinaire qu’il est plus admirable que haïssable.
Un chapitre est consacré à l’éducation de Marie au Temple, où le scénario glisse une touchante allusion à la charité de Marie. C’est un geste, comme la caméra les aime, plus facile à fixer que les pensées et c’est pourquoi le réalisateur n’est jamais aussi à l’aise que dans les scènes d’action, le massacre des saints innocents ou la fuite en Égypte.

François Maximin

© LA NEF n° 376 Janvier 2025