Loveable
(18 juin 2025)
Maria et Sigmund ont quatre enfants et chacun une carrière à gérer. Un soir, Sigmund annonce qu’il veut divorcer… Ce premier film de la Norvégienne Lilja Ingolfsdottir est bien dans la manière du cinéma scandinave, stylistiquement épuré, dramatiquement intense, psychologiquement acéré.
Le film repose tout entier sur les deux personnages, excellemment joués, mais surtout sur la femme, qu’incarne avec une vérité presque dérangeante Helga Guren. Elle apparaît rarement comme la jolie femme qu’elle est en réalité, mais le plus souvent affligée par les atteintes de toute sorte qu’elle subit. Elle n’est pas « loveable » au sens courant d’« aimable » car la vie d’une mère de famille attachée à sa carrière ne laisse guère de place au glamour. Et quand son mari, toujours en voyage, la laissant avec les multiples tâches, les enfants devenus rebelles et la charge mentale, lui reproche de ne pas se soucier de lui, elle ne trouve plus rien en elle-même d’aimable.
Ainsi résumé, ce portrait de femme pourrait sembler pénible. Il n’en est rien, parce que la réalisatrice et l’actrice, parfaitement raccordées, montrent profondément ce que signifie loveable appliqué à cette femme : digne d’amour. Une dignité qui ne lui vient pas de qualités particulières mais de sa simple humanité. Et l’on est élevé à cette généralité non par le discours mais par une multiplicité de scènes ordinaires, vibrantes de vérité, où chacun, à un moment ou à un autre, peut se trouver rejoint.
Islands
(2 juillet 2025)
Professeur de tennis dans un grand hôtel des Canaries, Tom mène une vie sans attaches, entre virées nocturnes alcoolisées et leçons monotones sur le court. Dans le flot des vacanciers débarque un couple d’Anglais et leur jeune fils. Ils demandent à Tom d’être leur guide pour visiter l’île. Des liens étranges se nouent entre eux.
Appelons cela un film policier puisqu’il y a un disparu, peut-être un mort, et une enquête policière. Mais à part ces marqueurs, on est bien loin du policier ordinaire. Ce n’est ni la nuit ni la ville, mais une île sublime bordée de mer enchanteresse et s’il y a bien des notes d’intrigue – Tom a l’impression d’avoir déjà rencontré l’Anglaise, le mari a un comportement douteux, le petit garçon est trop mignon – on ne sait jamais ce qui se passe exactement, pourquoi ceci et que vient faire cette scène-là (la ferme des dromadaires) ? Ce qui est sûr, c’est que le sous-officier de police locale est très sympa mais nettement moins malin que l’officier de police nationale. L’interprétation de tous ces personnages est d’une qualité enthousiasmante et si on ne comprend rien de ce que qui se trame au total on est absolument charmé à chaque seconde de dialogue. C’est totalement du cinéma, pensé, écrit, joué et filmé avec une passion visible et contagieuse. Certains s’y ennuieront, mais pour ceux qui aiment le cinéma pour lui-même, c’est un pur moment de plaisir.
François Maximin
© La Nef n° 382 Juillet-Août 2025