LA PROFONDEUR DU PRÉSENT – Une histoire de (la) pensée
RÉMI BRAGUE
Avec Charles-Henri d’Andigné
Hermann, 2025, 274 pages, 15 €
Rémi Brague est philosophe, membre de l’Institut, professeur émérite aux universités de Panthéon-Sorbonne et de Munich, auteur d’une œuvre riche et variée centrée sur la pensée médiévale, aussi bien chrétienne que musulmane. Mais qui est-il vraiment ? Et quels sont les grands axes de sa pensée ? C’est à ces questions que répond cet excellent livre d’entretiens, intelligemment menés par Charles-Henri d’Andigné, journaliste à Famille chrétienne. D’emblée, on entre dans ces échanges passionnants qui révèlent le caractère facétieux et l’humour profond d’un grand esprit amateur de calembours (et de Tintin). On découvre des aspects intimes, une enfance heureuse, malgré l’absence d’un père qu’il n’a pas connu, mort en Indochine, avec la chance d’avoir eu de bons formateurs, lui qui vient d’un milieu modeste, et de parvenir ainsi par la méritocratie à réaliser de grandes études (Normale Sup, agrégation et doctorat de philosophie). Il parle de sa foi, de la découverte de la philosophie et, surtout, des thèmes qui lui sont chers et qui ont été l’objet de ces nombreux livres. Ainsi défilent la naissance de la pensée avec les Grecs, la chrétienté, l’Europe, l’islam, les Lumières, le projet moderne (qui « a tendance à s’autodétruire sur le long terme »), etc. Bref, un large tour d’horizon qui permet de remettre les idées à leur place. Revigorant et salutaire.
Christophe Geffroy
ADIEU À CÉSAR ?
Essais sur la théologie politique
sous la direction de JEAN-NOËL DUMONT et VINCENT AUBIN
Peuple Libre, 2024, 240 pages, 20 €
Aux Pharisiens qui tentent de le piéger sur la question de l’impôt à payer à l’occupant romain, Jésus déclare : « Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ». Comment comprendre cette phrase, prononcée trois jours avant sa mort sur la croix, sous les ordres du représentant de César ? Si une certaine exégèse moderne y a vu la défense d’une séparation stricte entre le spirituel et le temporel, d’une division de l’existence en deux sphères autonomes de souveraineté, cette interprétation se heurte à la conception biblique de Dieu créateur de toutes choses : comme le soulignait Dorothy Day, une fois rendu à Dieu ce qui lui appartient, il ne reste pas grand-chose pour César. Comment comprendre alors la distinction opérée ici ? En termes pratiques : comment être et agir dans le monde, quand on a sa citoyenneté dans les cieux ?
Voilà le « problème théologico-politique » qui constitue le fil rouge des neuf articles réunis ici. Fil parfois ténu, tant ces contributions diffèrent dans leurs thèmes, leurs ambitions et leurs conclusions. Ce qui demeure, comme le souligne Vincent Aubin dans son excellente introduction, c’est la densité d’un problème qu’on ne prétendrait réduire sans le manquer, que ce soit en interprétant cette distinction des ordres comme un appel à laïciser l’existence, ou alors en l’ignorant jusqu’à perdre de vue la spécificité spirituelle de la bonne nouvelle chrétienne, et ôter au temporel sa consistance propre. Au fil de la lecture, ce problème apparaît cependant dans sa très grande fécondité, tant les réflexions et les interprétations qu’il suscite sont des ressources précieuses pour méditer le sens de la vie chrétienne dans le siècle. Faute de pouvoir les citer tous, on soulignera le très bel article de Giulio di Ligio sur la nation dans la pensée du père Fessard, ainsi que la méditation lumineuse de Pierre Manent sur l’Église. Une contribution éclectique mais de grande qualité au problème chrétien du politique.
Godefroy Desjonquères
LETTRES AUX PÈRES DE FAMILLE
BENOÎT DE BLANPRÉ
Mame, 2025, 96 pages, 12,90 €
À une époque où la figure du père est quelque peu malmenée, voire effacée, ces lettres simples et touchantes visent juste. D’emblée, l’auteur nous fait partager sa conviction : « le chemin de la paternité nous conduit résolument vers Dieu. La vie de père est une vocation de saint ! Non parce qu’elle est héroïque mais parce que la paternité est un lieu privilégié de l’exercice de l’amour du prochain, dans la simplicité du quotidien. » Cette parole de Guy de Larigaudie, citée par l’auteur, résume fort bien l’esprit de ces lettres : « Il ne faut pas nous désoler d’être seulement ce que nous sommes. L’aventure la plus prodigieuse est notre propre vie et celle-là est à notre taille. » Un livre d’une grande sensibilité, nourri d’une foi profonde qui donne de vraies raisons d’espérer. Pour tous les pères ou ceux qui se préparent à le devenir.
Christophe Geffroy
LE DHIMMI
BAT YE’OR
Avec une étude de Rémi Brague
Les Provinciales, 2025, 332 pages, 26 €
Savante d’origine égyptienne et de confession juive, établie en Europe après avoir été expulsée de son pays par le président Nasser en 1957, Bat Ye’Or (« Fille du Nil » en hébreu) s’est fait connaître par ses travaux concernant le statut des non-musulmans dans les pays conquis par l’islam à partir du VIIe siècle. Il s’agit de la dhimmitude (du mot arabe dhimma = protection), qui sous-entend le concept de sujétion humiliante, applicable à ces « gens du Livre » (juifs et chrétiens) coupables, selon le Coran, de ne pas pratiquer « la vraie religion » : « Combattez-les jusqu’à ce qu’ils paient directement le tribut après s’être humiliés » (9, 29).
Bat Ye’Or explique sa motivation. Après un premier livre concernant les juifs dhimmis, paru en 1980, Bat Ye’Or, sensibilisée à la souffrance des chrétiens libanais qui se disaient incompris, décida d’élargir sa recherche en examinant le sort des Orientaux chrétiens soumis à cette doctrine islamique, tout en maintenant celui des juifs. Aujourd’hui, elle estime aussi nécessaire de réfléchir à la forme particulière de la dhimmitude qui s’impose en Europe à travers le programme d’institutions musulmanes s’appuyant sur l’expansion de l’islam et œuvrant par divers moyens (démographie, culture, droit, mœurs, prosélytisme, terrorisme). Ces méthodes s’inscrivent, relève l’auteur, dans le cadre d’un djihad multiforme (« guerre juste et défensive d’ordre divin ») qui se rapporte aussi au contexte israélo-palestinien.
Toutes ces réalités émergent d’une riche série de documents historiques et contemporains qui constituent l’essentiel de l’ouvrage et couvrent l’ensemble des territoires concernés : textes de légistes remontant aux débuts de l’islam et perdurant jusqu’à l’époque moderne, témoignages de voyageurs et diplomates européens en Orient et au Maghreb, traités entre l’Europe et l’Empire ottoman, massacres des Arméniens, etc.
Dans l’étude qui ouvre ce livre consistant, Rémi Brague choisit « une image quelque peu baroque » pour définir la dhimmitude : pour l’islam, les deux religions qui l’ont précédé sont comme les deux premiers étages d’une fusée dont il est le troisième et dernier ». Autrement dit, avec Mahomet et le Coran tout est accompli ! Et la soumission s’impose à tous.
Annie Laurent
CHASTETÉ
Une réconciliation des sens
Mgr ERIK VARDEN
Artège, 2025, 236 pages, 19,90 €
Monseigneur Varden est norvégien ; né dans une famille luthérienne, il devient catholique puis moine cistercien en Angleterre et enfin évêque de Trondheim en Norvège. L’auteur, de manière assez originale, veut dépoussiérer le concept de chasteté.
Il rappelle d’abord que l’Église – même si son propos est déformé sur le sujet – a toujours présenté la chasteté, non comme une entrave ou une privation, mais comme une libération, une recherche d’intégrité et d’intégration du corps et de l’âme, et une harmonie de l’être incarné. La chasteté n’est pas une « sublimation » en dehors de la chair, mais une réorientation de celle-ci.
L’ouvrage n’est pas un traité systématique de théologie morale. C’est un essai qui illustre la catéchèse de l’Église en puisant très largement dans la culture chrétienne et profane. Mgr Varden cite la Bible bien sûr, mais nous fait découvrir aussi un très riche commentaire biblique, syriaque, du Ve siècle, La Caverne aux trésors, et cite – entre autres – les Pères du désert. Pour soutenir son propos, il convoque des romans, de la poésie, du théâtre et de l’opéra, et aussi la sculpture ou la peinture. Le lecteur francophone fera certainement de belles découvertes parmi les œuvres norvégiennes, allemandes et anglophones, citées abondamment. Une vision éclectique et profonde de la chasteté.
Abbé Étienne Masquelier
TALLEYRAND, la puissance de l’équilibre
CHARLES-ELOI VIAL
Perrin, 2025, 256 pages, 25 €
Talleyrand (1754-1838) est certainement une des figures les plus fascinantes de l’histoire de France, et de ce fait, il a bénéficié de très nombreuses biographies. L’intérêt de celle-ci est qu’elle est très bien écrite, claire, mettant bien en avant les nombreuses qualités de Talleyrand (entre autres, une intelligence supérieure qui sait juger lucidement des situations les plus complexes, alliée à un sang-froid à toute épreuve, qui en font un diplomate hors du commun), ainsi que ses vices, tout aussi nombreux (vénalité, hypocrisie, mœurs déplorables, cynisme). Cette biographie est de plus très bien illustrées par des documents d’époque judicieusement choisis, l’auteur étant archiviste-paléographe à la BNF. En résumé, une excellente synthèse très abordable, destinée au grand public, pour découvrir un homme qui fut un des évêques les plus déplorables de l’Église catholique de son temps – il avait une excuse : une absence évidente de vocation associée à une forte pression familiale d’entrer dans les ordres, de la part de parents qui ne l’aimaient pas à cause de son pied bot – mais qui rendit à la France le plus grand des services lors du congrès de Vienne en 1815, en réussissant à réduire considérablement les exigences des vainqueurs de Napoléon (l’empire d’Autriche, l’Angleterre, la Russie et la Prusse) vis-à-vis de notre pays, et cela, en semant la méfiance et en attisant la rivalité entre eux.
Bruno Massy de La Chesneraye
NAPOLÉON ET JOSÉPHINE
L’intime et le grandiose
PIERRE BRANDA
Perrin, 2025, 362 pages, 23,90 €
Nos temps démocratiques aiment les couples politiques, poussés par l’ambition, déterminés à marcher ensemble vers les sommets. Napoléon et Joséphine, dès l’extrême fin du XVIIIe siècle, furent un de ceux-ci, illustrant la rupture avec l’Ancien Régime et ses mariages arrangés, diplomatiques et dynastiques. Un amour et une ambition, dominés par la politique : Pierre Branda montre très bien cette réalité dans cette biographie croisée de deux destins, qui se rejoignirent dans les dernières années de la Révolution, sans se douter jusqu’où ils parviendraient. Le Corse et la Créole, tous les deux insulaires déracinés et ballottés par les vents violents de la Révolution, se lièrent par un amour sincère, presque passionnel, physique et moral, bien que traversé par les orages de la jalousie. Mais ce très plaisant ouvrage, très documenté, met bien en lumière les ambitions de deux époux, leurs capacités à se manœuvrer l’un l’autre, y compris dès leur mariage civil précipité, avant que la gloire de la campagne d’Italie ne vienne bouleverser leurs destins comme leur couple. Joséphine, dès lors, dut naviguer au milieu des écueils, entre liaisons adultères (du côté de Napoléon d’une manière évidente), crise de couple, intrigues de familles entre Beauharnais et Bonaparte, ambitions et manœuvres politiques, misogynie et autoritarisme de Napoléon et surtout infertilité. Ce lent poison, qui rendait l’épouse incapable de donner au nouveau César l’héritier qu’il attendait, consuma le mariage de l’intérieur, malgré les efforts désespérés de Joséphine, qui alla jusqu’à demander à Pie VII un mariage religieux, à la veille du sacre, pour mieux consolider son union. Mais rien n’y fit. Napoléon divorça. Non sans garder d’évidents sentiments pour celle qu’il aima parce qu’il la savait fidèle. Lui qui finit trahi par tous.
Frédéric Le Moal
PEUT-ON ÊTRE CHRÉTIEN ET DÉMOCRATE ?
CHRISTIAN FRANÇOIS
Préface de Rémi Brague
Éditions de Flore, 2025, 368 pages, 15 €
Dans un essai roboratif, précis et bien documenté, Christian François s’interroge sur la comptabilité du christianisme avec la démocratie telle qu’elle se présente sous nos yeux. Après avoir balayé l’Ancien puis le Nouveau Testament, l’auteur en conclut que la question politique n’est pas centrale pour le peuple élu ni pour les premiers chrétiens, car c’est le Salut qui occupe le cœur de l’Alliance. La politique est reléguée au second plan par les Écritures saintes qui insistent sur la conformation du peuple élu à la loi morale puis, avec Jésus, sur la nécessité de donner la primauté au « royaume qui n’est pas de ce monde » (Jn, 18, 36).
Rien n’est donc plus étranger au christianisme que de s’investir corps et âme au profit de la chose politique comme le font les païens alors que ce monde est appelé à périr. Le message politique central de la Bible, c’est la mise à distance du politique et la lutte contre l’idolâtrie du pouvoir. Aussi, l’auteur trouve curieux que le Magistère récent de l’Église catholique, notamment à travers le Compendium de l’Église catholique (2004) revendique une option préférentielle pour la démocratie, régime qui, pourtant, depuis 200 ans, révoque toute loi naturelle au profit d’une tyrannie des droits individuels éloignée de toute perspective chrétienne. Il faudrait plutôt, selon lui, qualifier la démocratie de « structure de péché ».
C’est peut-être là le seul reproche que l’on puisse faire à un ouvrage par ailleurs fort bien écrit mais imprécis sur ce point et injuste avec Jacques Maritain. Car si la démocratie est envisagée de manière positive par l’Église, c’est uniquement en tant que « système qui assure la participation des citoyens aux choix politiques et garantit aux gouvernés la possibilité de choisir et de contrôler leurs gouvernants, ou de les remplacer de manière pacifique » (Jean-Paul II, Centesimus annus, 1991). En revanche, la démocratie comme idéologie reposant sur la souveraineté du peuple et le relativisme éthique reste toujours opposée à l’enseignement de l’Église sur l’origine divine du pouvoir et le respect de la loi naturelle.
On ne saurait donc reprocher à l’Église d’avoir voulu fixer un cadre au regard duquel la démocratie serait acceptable car cela relève de sa mission qui consiste à « christianiser » toutes les réalités du monde pour les remettre à l’endroit et, ainsi, donner une espérance au monde.
Benoît Dumoulin
DIEU TRINITÉ
PHILIPPE-MARIE MARGELIDON OP
Saint Léger Éditions, 2025, 160 pages, 14 €
Le grand théologien dominicain, Philippe-Marie Margelidon nous rappelle que, pour le croyant et pour tout homme, la fin ultime de la connaissance n’est pas le Christ mais bien Dieu Trinité. La Trinité n’est pas une option ou un parachèvement d’une quête religieuse, elle en est le cœur.
Il détaille pour nous la théologie trinitaire de saint Thomas d’Aquin, selon le plan du Compendium Thelogiae. Il expose ainsi d’abord ce qui a trait à l’unité de Dieu : ses perfections, sa bonté, la providence… puis en vient à chaque personne divine, et en particulier au concept de relation subsistante. Le langage est technique, et l’exposé précis et clair. Il donne un aperçu de la cohérence de la théologie thomasienne et par extension de la théologie trinitaire catholique. Un ouvrage exigeant, qui renforce notre confiance dans le dogme et nous fait davantage entrer dans la contemplation du mystère de Dieu.
Abbé Étienne Masquelier
JOURNAL D’UN CURÉ DE PARIS
Mgr PATRICK CHAUVET
Fayard, 2025, 196 pages, 21,90 €
Mgr Chauvet, curé de la paroisse de la Madeleine depuis 2022, ne propose pas ici une autobiographie au sens strict du terme, qui se limiterait à une chronologie de son parcours, comme il le précise lui-même dans l’introduction de son livre. Il s’agit plutôt d’une démarche mêlant une action de grâce pour sa vocation sacerdotale et un regard réaliste sur l’Église et la société pour en saisir les enjeux contemporains ainsi que les perspectives d’avenir.
Ordonné prêtre par le cardinal Marty en 1980, l’auteur a ensuite été appelé à collaborer avec le cardinal Lustiger, qui lui a confié d’importantes missions dans divers domaines, avant de se retrouver aux côtés du cardinal Vingt-Trois. L’évocation de ses expériences marquantes lui permet d’offrir à ses lecteurs un regard précis sur la vie du diocèse de Paris, ses trésors et ses faiblesses, pastoraux comme spirituels. « En soixante-dix ans, nous sommes passés d’une Église influente et reconnue à une Église très fragile », observe-t-il par allusion à la déchristianisation de la France (négligence des sacrements, pauvreté liturgique, dérive morale, sécularisation de la société et crise des vocations).
« Notre-Dame, la toute belle ». Sous ce titre, Mgr Chauvet consacre un chapitre éloquent et émouvant à la fonction de recteur de la cathédrale de Paris qu’il a occupée durant six ans, dont la moitié marquée par l’incendie de 2019. Il passe ensuite à l’évocation personnelle de rencontres avec quelques « grands de ce monde », d’attachement à certains lieux et de sa dette envers plusieurs saints auxquels il voue une dévotion particulière. Et il conclut son ouvrage en insistant auprès de ses lecteurs sur l’intention qui en a motivé l’écriture : « pour que l’espérance retrouve sa place dans vos vies afin que tous vous deveniez des sentinelles qui regardent vers l’avenir enchanteur ! ».
Annie Laurent
Romans à soignaler
L’ENSEVELI
VALÉRIE PATURAUD
Éditions Les Escales, 2025, 230 pages, 20 €
Sur le front de la Grande Guerre, Abel Chagnac est gravement blessé aux jambes en sauvant un inconnu enseveli par un tir d’obus, dont seule la main portant une chevalière était visible, dressée comme un signe. Abel est soigné dans un hôpital de fortune en arrière des lignes ; un blessé de la face est installé avec beaucoup d’égards dans le lit voisin du sien. Il porte une chevalière… Entre Abel, ouvrier, syndicaliste, « né de gens de peu », et le major Adrien Delaitre, médecin, une profonde amitié se noue.
L’auteur plonge son lecteur avec brio, à petites touches et d’une très belle plume, dans le monde inhumain des tranchées, ses boyaux inondés, ses corvées, les séchoirs, à travers les portraits de L’Émile, Le Garec et son chien, le Borel, Henri Parfait et tant d’autres. Dans cette guerre, les soldats risquaient leur vie autant à l’assaut qu’en refusant le combat. De cette épreuve trop grande, il est difficile de revenir : « Le malheur, comme une pierre jetée dans l’eau du ruisseau, déploie ses ondes bien au-delà du point de sa chute », écrit l’auteur.
À travers ce roman, Valérie Paturaud, fait revivre une histoire humaine, usant d’un style qui « colle » à l’origine sociale de chacun de ses personnages, permettant une belle représentation de l’époque. Chaque page de L’enseveli est imprégnée de miséricorde et de bienveillance là où cette guerre en a cruellement manqué. Un bel hommage rendu aux combattants de la Première Guerre mondiale.
Marie-Anne Chéron
LAISSEZ-MOI BRÛLER EN PAIX
PETER FARRIS
Gallmeister, 2025, 432 pages, 24,90 €
Ancienne policière, Sallie Crews a fondé un stand de tir près d’Atlanta. La mort d’un juge corrompu la replonge dans une vieille affaire, une bavure policière ayant entraîné de graves blessures sur un enfant demeuré défiguré, Manny, lequel est devenu un avocat célèbre traquant les erreurs policières. Elle-même semble être la cible suivante du tueur, comme s’il s’agissait d’une vengeance, alors qu’elle n’est pour rien dans la bavure évoquée. Pour elle, la seule façon de s’en sortir est de découvrir la vérité, et elle s’allie à cette fin de façon improbable avec Manny.
Gallmeister a le don de nous faire découvrir des auteurs américains de talent : cette histoire bien écrite est menée tambour battant avec un crescendo dans l’action qui fait qu’on ne lâche plus cet excellent roman évoquant la corruption d’une partie de l’administration et de la police. Détente garantie.
Simon Walter
© La Nef n° 385 Novembre 2025
La Nef Journal catholique indépendant