Fatima : histoire et message

« Fatima est sans aucun doute la plus prophétique des apparitions modernes », a dit Benoît XVI en 2007. Elle constitue aussi, comme toutes les apparitions mariales antérieures, une pédagogie surnaturelle.

L’histoire des apparitions a commencé en 1915, dans le hameau d’Aljustrel dépendant de la paroisse de Fatima. Il y eut d’abord trois manifestations angéliques. Lucie Dos Santos, âgée de 8 ans, était allée garder son troupeau en compagnie de trois autres fillettes. Depuis une colline, le Cabeço, à environ 400 mètres du hameau, alors qu’elles commençaient à réciter le chapelet, toutes quatre virent, en contrebas, « comme suspendue dans l’air au-dessus des arbres, une figure semblable à une statue de neige que les rayons du soleil rendaient un peu transparente ».
La « figure », assez indistincte, restait silencieuse et immobile. Elle disparut dès que les fillettes eurent fini de dire leur chapelet. Elle se manifesta à deux autres reprises dans les mois suivants. Ces manifestations angéliques de 1915 étaient comme une préparation aux apparitions angéliques de l’année suivante.

LES APPARITIONS DE L’ANGE
L’année suivante, au printemps 1916, les deux cousins de Lucie – François, qui allait avoir huit ans, et Jacinthe qui avait six ans – obtinrent la permission d’aller garder leur troupeau avec Lucie. Un jour, dont la date précise n’a pas été connue, les trois enfants virent, au pied du Cabeço, la même figure angélique « s’avancer vers eux », au-dessus d’oliviers. Mais cette fois elle était beaucoup plus distincte. Arrivé près des enfants, le mystérieux personnage les rassura et leur dit : « N’ayez pas peur ! Je suis l’Ange de la Paix. Priez avec moi ! » Il s’agenouilla, inclina la tête jusqu’à terre et fit répéter trois fois aux enfants une prière : « Mon Dieu, je crois, j’adore, j’espère et je vous aime. Je vous demande pardon pour ceux qui ne croient pas, qui n’espèrent pas, qui n’adorent pas, qui n’espèrent pas et ne vous aiment pas. » Puis l’Ange se releva et leur dit avant de disparaître : « Priez ainsi. Les cœurs de Jésus et de Marie sont attentifs à la voix de vos supplications. »
Il est à noter que François, s’il avait vu la même chose que les deux fillettes, n’avait pas entendu la voix de l’Ange, comme, l’année suivante, il verra mais n’entendra jamais la Vierge Marie.
Une nouvelle apparition de l’ange eut lieu quelque temps plus tard. Alors que les trois enfants jouaient au fond du jardin de la maison de Lucie, près du puits, ils virent tout à coup le même ange qui leur dit : « Que faites-vous ? Priez, priez beaucoup ! Les Saints Cœurs de Jésus et de Marie ont sur vous des desseins de miséricorde. Offrez constamment au Très-Haut des prières et des sacrifices. » Lucie demanda : « Comment ferons-nous des sacrifices ? » L’ange répondit : « De tout ce que vous pourrez, offrez à Dieu un sacrifice, en acte de réparation pour les péchés par lesquels Il est offensé, et de supplication pour la conversion des pécheurs. Attirez ainsi la paix sur votre Patrie. Je suis son Ange Gardien, l’Ange du Portugal. Surtout, acceptez et supportez avec soumission les souffrances que le Seigneur vous enverra. »
Une ultime apparition de l’Ange eut lieu en septembre 1916, au pied du Cabeço. Ce jour-là, les trois enfants reçurent une communion eucharistique miraculeuse.

LES SIX APPARITIONS
Les six apparitions de la Vierge Marie dont vont bénéficier en 1917 Lucie, François et Jacinthe vont se dérouler à la Cova da Iria, sauf une fois.
Le 13 mai 1917, qui était un dimanche, Lucie, François et Jacinthe étaient partis, après la messe, garder leurs troupeaux. Ils virent un éclair puis, « sur un petit chêne-vert, une Dame toute vêtue de blanc, plus brillante que le soleil ». Les enfants surpris s’arrêtèrent de jouer. L’apparition les rassura, se présentant comme venue « du Ciel » et leur demanda « de venir ici pendant six mois consécutifs, le 13, à cette même heure ». Ce jour-là, elle demanda aussi : « Récitez le chapelet tous les jours, afin d’obtenir la paix pour le monde et la fin de la guerre. »
Le 13 juin suivant, 50 à 60 personnes étaient présentes à la Cova da Iria. La Vierge Marie demanda à nouveau de dire « le chapelet tous les jours ». Elle annonça : « Jacinthe et François, je les emmènerai bientôt [au Ciel]. » Lucie, elle, aura une mission particulière à accomplir : « Jésus veut se servir de toi afin de me faire connaître et de me faire aimer. Il veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. »
La troisième apparition, celle du 13 juillet, fut la plus longue. La Vierge Marie annonça que lors de sa dernière apparition elle ferait un miracle. Elle révéla aussi aux voyants ce qu’on a appelé le « secret de Fatima » : un secret en trois parties. Il y eut d’abord une vision de l’enfer, puis un message de la Vierge Marie sur la dévotion à son Cœur immaculé et sur la consécration de la Russie, et enfin une autre vision qui invitait à la pénitence et montrait notamment un pape souffrant et mourant [voir encadré p. 20].
Après cette apparition, plusieurs articles parus dans les journaux firent connaître l’événement dans tout le pays et amenèrent une intervention brutale des autorités civiles. Le 13 août, elles empêchèrent les enfants de se rendre sur les lieux de l’apparition. La quatrième apparition eut donc lieu plus tard, le dimanche 19 août. Elle n’eut pas lieu à la Cova da Iria, mais aux Valinhos, une zone agricole au nord-ouest d’Aljustrel. Ce jour-là, la Vierge Marie confirma le miracle à venir, promit à nouveau des guérisons, demanda de « continuer à réciter tous les jours le chapelet » et de faire « des sacrifices pour les pécheurs ». La Vierge Marie demanda aussi qu’on construise une chapelle.
La cinquième apparition, le 13 septembre 1917, se déroula au lieu habituel, à la Cova da Iria. « Continuez à dire le chapelet afin d’obtenir la fin de la guerre, demanda la Vierge. En octobre, Notre-Seigneur viendra ainsi que Notre-Dame des Douleurs et du Carmel, Saint Joseph avec l’Enfant Jésus afin de bénir le monde. »
Le 13 octobre, une foule de 30 000 à 40 000 personnes se pressait à la Cova da Iria. Des fidèles étaient venus de toutes les provinces du pays. L’annonce du miracle avait attiré aussi nombre de curieux, de sceptiques et des journalistes venus chercher la preuve – si aucun fait extraordinaire ne se produisait – que les apparitions étaient une illusion, voire une supercherie.
L’apparition en tant que telle fut brève : « Je veux te dire que l’on fasse ici une chapelle en mon honneur. Je suis Notre Dame du Rosaire. Que l’on continue toujours à réciter le chapelet tous les jours. La guerre va se terminer et les militaires retourneront bientôt chez eux. »
Pour les petits voyants, cette ultime apparition se prolongea par des visions successives de Notre-Dame, de l’Enfant Jésus et de saint Joseph. Pendant ce temps, la foule assista au miracle annoncé ; ce qu’on a appelé « la danse du soleil ». Le phénomène a duré une dizaine de minutes. Même ceux qui ne croyaient pas à l’authenticité des apparitions en furent témoins.

LA RECONNAISSANCE PAR L’ÉGLISE
Dès le 27 mai 1917, quelques jours après la première apparition, le P. Manuel Marques Ferreira, curé de la paroisse de Fatima, a interrogé les petits voyants. Un autre prêtre, le chanoine Formigão, a assisté, discrètement, à la cinquième apparition, le 13 septembre, et a commencé lui aussi à interroger les trois voyants. Ces interrogatoires menés dès les premiers temps, avant que les événements soient terminés, sont précieux aussi parce que deux des trois voyants moururent avant qu’une commission canonique d’enquête soit créée. François Marto mourut le 4 avril 1919 et Jacinthe le 20 février 1920, tous deux victimes de ce qu’on a appelé la « grippe espagnole ».
Le 3 mai 1922, l’évêque de Leiria, Mgr da Silva, créait une commission pour étudier les faits et organiser un procès canonique. La commission, qui interrogea Lucie devenue religieuse et différents témoins, ne remit son rapport à l’évêque qu’en avril 1930. L’évêque prit la précaution d’adresser un dossier complet au pape Pie XI. Celui-ci l’encouragea à donner un jugement positif. Par une lettre pastorale, datée du 13 octobre 1930, Mgr da Silva déclarait solennellement « comme dignes de foi les visions des enfants à la Cova da Iria » et autorisait « officiellement le culte de Notre-Dame de Fatima ».

LA CONSÉCRATION DE LA RUSSIE
En juin 1921, avant de partir à l’Institut des Sœurs de Sainte-Dorothée à Porto, pour y poursuivre ses études, Lucie avait bénéficié d’une nouvelle apparition de la Vierge à la Cova da Iria, comme pour un encouragement ou une consolation. Durant l’été 1925 elle décida d’entrer dans la congrégation religieuse qui l’avait accueillie et formée. Dans le couvent de Pontevedra, en Espagne, elle eut deux apparitions, le 10 décembre 1925 et le 15 février 1926. Elles furent comme un prolongement et un approfondissement de celles de Fatima et visaient à répandre la dévotion au Cœur immaculé de Marie [voir encadré p. 19].
Après son postulat passé à Pontevedra, Lucie commença son noviciat au couvent de Tuy. Le 13 juin 1929, alors qu’elle priait seule dans la chapelle, la Vierge Marie lui apparut à nouveau. L’objet spécifique de cette nouvelle apparition était la consécration de la Russie. La Vierge Marie dit à Lucie : « Le moment est venu où Dieu demande au Saint-Père de faire, en union avec tous les évêques du monde, la consécration de la Russie à mon Cœur immaculé, promettant de la sauver par ce moyen. Les âmes que la Justice de Dieu condamne pour les péchés commis contre moi, sont si nombreuses, que je viens demander une réparation : sacrifie-toi à cette intention et prie. »
L’attention spécifique à la Russie dans le message de Fatima est évidemment à mettre en rapport avec le communisme. Lorsque le 13 juillet 1917, dans le fameux « secret », la Vierge Marie a parlé de la Russie, des « erreurs » qu’elle répandrait à travers le monde, des « guerres » qu’elle provoquerait et des « persécutions contre l’Église » qu’elle mènerait, personne n’aurait pu prévoir que les communistes allaient prendre le pouvoir en Russie trois mois plus tard ni quelle serait la nature du régime qui allait s’installer.
En 1929, quand la Vierge Marie vient demander la consécration de la Russie, le régime communiste y est désormais solidement installé. Si l’opinion publique ne mesure pas encore l’ampleur du totalitarisme soviétique et les millions de morts dont il est déjà responsable, on sait que Staline a accaparé tous les pouvoirs, que des camps d’internement existent dans tout le pays, que les persécutions dont sont victimes les Églises (orthodoxe et catholique) sont féroces. En revanche, à cette date, le totalitarisme soviétique n’avait pas encore atteint toute son ampleur. Personne ne pouvait prévoir non plus que la fin de la Seconde Guerre mondiale allait favoriser l’établissement de régimes communistes dans la moitié orientale de l’Europe, puis en Asie, avec les persécutions contre l’Église qui allaient s’ensuivre.
Évoquée en 1917, demandée en 1929, la consécration de la Russie n’est pas un élément anecdotique du message de Fatima. Elle en est un des points majeurs, en lien direct avec la dévotion au Cœur immaculé de Marie. Dieu demandait que la consécration de la Russie au Cœur immaculé de Marie soit faite par le pape « en union avec tous les évêques du monde ». Par plusieurs actes solennels, Pie XII (en 1942 et 1952), Paul VI (en 1964) et Jean-Paul II (en 1982 et 1983) ont accompli une consécration au Cœur immaculé de Marie. Mais ce n’est qu’avec la consécration faite le 25 mars 1984 que « la demande du Ciel » fut accomplie, selon l’affirmation répétée de Sœur Lucie, le pape ayant formellement incité les évêques du monde entier à s’associer à son geste de consécration du « monde » et « d’une manière spéciale les hommes et les nations qui ont particulièrement besoin de cette offrande et de cette consécration ».
Par la consécration au Cœur immaculé de Marie, la Russie « sera sauvée » avait promis la Vierge Marie. La Mère de Dieu n’avait pas dit que la Russie serait convertie, d’un coup, soudainement, au catholicisme mais qu’elle cesserait de répandre « ses erreurs dans le monde, de provoquer des guerres et de persécuter l’Église ». C’est ce qui s’est produit à partir de 1984 : avènement de Gorbatchev, puis fin du communisme dans les pays de l’Est et en Russie, liberté rendue aux Églises, catholique et orthodoxe.

Yves Chiron

Le « troisième secret » de Fatima

Lors de sa troisième apparition à Fatima, le 13 juillet 1917, la Vierge Marie a révélé un « secret » aux pastoureaux, demandant : « Cela, ne le dites à personne ». Ce secret, en trois parties – une vision, un message et une autre vision –, ne sera connu que progressivement, à partir de 1941. La troisième partie (qu’on appelle parfois, de façon impropre, le « troisième secret ») ne sera mise par écrit par Sœur Lucie qu’en janvier 1944, suite aux demandes répétées de l’évêque de Leiria. Ce court texte n’existe qu’en une seule version, manuscrite, sur quatre petites pages.
Sœur Lucie plaça le texte dans une enveloppe fermée et scellée avec de la cire. Le 17 juin, l’enveloppe contenant le « secret » fut remise à l’évêque de Leiria qui ne l’ouvrit jamais et la transmit au Saint-Siège en 1957.
Ce texte, dont nul ne savait s’il contenait un message inconnu de la Vierge ou la description d’une vision, donnera lieu, pendant plus d’un demi-siècle, à toutes les hypothèses et aux supputations les plus variées. À la fin des années 1950 et dans les années 1960, l’opinion la plus répandue était que le « troisième secret » annonçait quelque châtiment ou événement effroyable. À partir des années 1970, suite à la crise que connaissait l’Église, une autre opinion prévalut, y compris chez certains spécialistes de Fatima : la partie non révélée du secret évoquait cette crise et des défaillances de la hiérarchie ecclésiastique.
Pie XII n’a pas lu ce secret. Jean XXIII puis Paul VI l’ont lu mais n’ont pas cru opportun de le publier. C’est après l’attentat dont il fut la victime, le 13 mai 1981, attentat qui le mena aux portes de la mort, que Jean-Paul II a pris connaissance du texte. Il ne le publiera qu’en 2000, après s’être assuré auprès de Sœur Lucie, par l’intermédiaire de Mgr Bertone, que le texte était bien authentique et complet. Le texte fut publié par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, précédé d’une présentation historique par Mgr Bertone et suivi d’un commentaire théologique par le cardinal Ratzinger.
Sœur Lucie avait décrit ainsi la deuxième vision du 13 juillet 1917 : « Nous avons vu sur le côté gauche de Notre-Dame, un peu plus en hauteur, un Ange avec une épée de feu dans la main gauche ; elle scintillait et émettait des flammes qui, semblait-il, devaient incendier le monde ; mais elles s’éteignaient au contact de la splendeur qui émanait de la main droite de Notre-Dame en direction de lui ; l’Ange, indiquant la terre avec sa main droite, dit d’une voix forte : Pénitence ! Pénitence ! Pénitence ! Et nous vîmes dans une lumière immense qui est Dieu : ”Quelque chose de semblable à la manière dont se voient les personnes dans un miroir quand elles passent devant”, un Évêque vêtu de Blanc, “nous avons eu le pressentiment que c’était le Saint-Père”. Divers autres Évêques, Prêtres, religieux et religieuses monter sur une montagne escarpée, au sommet de laquelle il y avait une grande Croix en troncs bruts, comme s’ils étaient en chêne-liège avec leur écorce ; avant d’y arriver, le Saint-Père traversa une grande ville à moitié en ruine et, à moitié tremblant, d’un pas vacillant, affligé de souffrance et de peine, il priait pour les âmes des cadavres qu’il trouvait sur son chemin ; parvenu au sommet de la montagne, prosterné à genoux au pied de la grande Croix, il fut tué par un groupe de soldats qui tirèrent plusieurs coups avec une arme à feu et des flèches ; et de la même manière moururent les uns après les autres les Évêques, les Prêtres, les religieux et religieuses et divers laïcs, hommes et femmes de classes et de catégories sociales différentes. Sous les deux bras de la Croix, il y avait deux Anges, chacun avec un arrosoir de cristal à la main, dans lequel ils recueillaient le sang des Martyrs et avec lequel ils irriguaient les âmes qui s’approchaient de Dieu. »
Dans son commentaire de 2000, le cardinal Ratzinger a estimé que cette vision de 1917 annonçait, de façon prophétique, la tentative d’assassinat de Jean-Paul II en 1981 et montrait aussi, de façon symbolique, les souffrances et persécutions de l’Église tout au long du siècle.

Y.C.

Le Cœur immaculé de Marie

Dans l’apparition du 13 juin 1917, la Vierge Marie avait dit à Lucie : « Jésus veut se servir de toi pour Me faire connaître et aimer. Il veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur immaculé. » Lors de l’apparition du 13 juillet, la deuxième partie du secret concernait cette dévotion : « Vous avez vu l’enfer où vont les âmes des pauvres pécheurs. Afin de les sauver, Dieu veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur immaculé. Si vous faites ce que je vous dis, beaucoup d’âmes seront sauvées et vous aurez la paix. […] Je viendrai demander la consécration de la Russie à mon Cœur immaculé et la Communion réparatrice des premiers samedis. »
À partir de 1925 cette annonce commença à se réaliser. Le 10 décembre 1925, au couvent de Pontevedra, la Sainte Vierge apparut à Sœur Lucie et lui demanda de répandre la dévotion à son Cœur immaculé : « Tous ceux qui, pendant cinq mois, le premier samedi, se confesseront, recevront la Sainte Communion, réciteront un chapelet, et passeront quinze minutes avec moi en méditant sur les quinze mystères du Rosaire, en esprit de réparation, je promets de les assister à l’heure de la mort avec toutes les grâces nécessaires pour le salut de leur âme. »
Cette apparition de Pontevedra reprend un des thèmes majeurs du message de Fatima : le sacrifice et la réparation. Mais s’y ajoute un appel pressant à faire connaître une dévotion concrète : la communion réparatrice dite des « cinq premiers samedis ».
Le 15 février 1926, l’Enfant-Jésus apparut à Sœur Lucie. Cette apparition était une nouvelle incitation à propager la dévotion au Cœur immaculé de Marie et donnait des précisions complémentaires sur sa pratique.
La pratique d’une consécration au Cœur immaculé de Marie était déjà ancienne dans l’Église comme la pratique de la communion réparatrice du samedi. La première demande d’une consécration au Cœur immaculé de Marie date du 3 décembre 1836 quand l’abbé Desgenettes entendit une voix intérieure lui demander de consacrer sa paroisse de Notre-Dame des Victoires. Le 16 décembre, il créait l’Association de prière en l’honneur du Cœur immaculé de la Très Sainte Vierge Marie, pour la conversion des pécheurs. Les membres de l’Archiconfrérie s’engageaient à dire chaque jour au moins un Je vous salue Marie pour la conversion des pécheurs, et aux intentions de l’Église et du pape, et à communier le premier samedi du mois, en l’honneur de la Très Sainte Vierge Marie. Sous le pontificat de saint Pie X, deux décrets, le 1er juillet 1905 et le 13 juin 1912, incitèrent à la communion réparatrice des premiers samedis du mois.

Les apparitions à Pontevedra viennent raviver cette pratique. Elles cherchent aussi à la favoriser en la limitant au premier samedi de cinq mois consécutifs. On peut dire que le Ciel a tenu compte de la faiblesse humaine. C’est ce qu’a dit Jésus à Lucie lors de l’apparition de 1926 : « Beaucoup d’âmes commencent, mais peu vont jusqu’au bout et celles qui le font, c’est dans le but de recevoir les grâces qui sont promises à ce sujet ; et il m’est plus agréable qu’on en fasse cinq avec ferveur et dans le but de soulager le Cœur de ta Mère du ciel plutôt que d’en faire quinze, tièdes et indifférents. » Le nombre cinq a aussi un sens précis : pour réparer « cinq espèces d’offenses et de blasphèmes, proférés contre le Cœur immaculé de Marie ».
Les papes successifs n’ont pas institué, officiellement, cette pieuse pratique des cinq premiers samedis du mois, mais, de différentes manières et à différentes époques, ils ont encouragé les fidèles à associer le culte du Sacré-Cœur de Jésus et le culte envers le Cœur immaculé de Marie car, selon l’expression de Pie XII, « notre salut vient de l’amour et des souffrances de Jésus-Christ indissolublement unis à l’amour et aux souffrances de sa Mère ».

Y.C.

Fatima : petite bibliographie
À différentes époques, entre 1935 et 1993, toujours à la demande de ses supérieurs, Sœur Lucie a rédigé ses souvenirs sur les apparitions de la Vierge Marie, sur les deux autres voyants et sur ses parents. Ces six Mémoires de Sœur Lucie ont été réunis en 2 volumes et traduits en français.
Elle a aussi commenté et expliqué le message de Fatima dans un long ouvrage publié en 1997 : Appels du Message de Fatima. Elle y présente les vingt demandes, recommandations et exhortations faites par la Vierge Marie lors de ses apparitions.
Après la mort de Sœur Lucie, la prieure et les autres religieuses du carmel de Coïmbra ont rédigé une biographie « officielle », très riche : Un chemin sous le regard de Marie. Biographie de Sœur Lucie de Fatima (Éditions du Parvis, 2016).
En France, le chanoine Barthas, mort en 1973, a multiplié les ouvrages, depuis Il était trois petits enfants (1942), pour faire connaître, de façon toujours plus précise, les apparitions et le message de Fatima. On doit signaler aussi les ouvrages de dom Claude-Jean Nesmy : Lucie raconte Fatima (1975), qui a fait connaître les premiers Mémoires de Sœur Lucie, et La Vérité de Fatima (1980). Le récent ouvrage du Père Jean-François de Louvencourt, moine cistercien, François et Jacinthe de Fatima (Éditions de l’Emmanuel, 2010, 615 pages), offre à la fois une histoire des apparitions, un portrait spirituel des trois voyants et une documentation très abondante sur Fatima et son message.
En 1992 le cardinal indien Padiyara et en 1993 le cardinal philippin Vidal ont pu avoir de longs entretiens avec Sœur Lucie. La retranscription de ces entretiens, enregistrés, a été publiée sous le titre Fatima. Sœur Lucie témoigne (Éditions du Chalet, 1999). À partir d’avril 2000, Mgr Bertone, alors secrétaire de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, a pu interroger longuement et à plusieurs reprises Sœur Lucie. Il a rendu compte de ces entretiens dans un ouvrage très utile (notamment à propos des questions controversées) : La dernière voyante de Fatima. Ce que m’a dit Sœur Lucie (Bayard, 2008).

Y.C.

NB (ndlr) – Signalons juste deux ouvrages récents :
– Fatima, n’en parlez pas, c’est un secret, de Louis-Marie Ariño-Durand, Cerf, 2017, 204 pages, 12 €.
– À Fatima, un rendez-vous avec le Ciel, de Véronique Duchâteau, Téqui, 2016, 182 pages, 13,90 €.

© LA NEF n°292 Mai 2017