Alors que les pays riverains de l’Orient méditerranéen et leurs voisins plus en retrait sont au cœur d’une actualité souvent inquiétante aux rebondissements mondiaux, la lecture de cet ouvrage, illustré de schémas, cartes et focus, est d’un grand intérêt. En présentant les constantes et les variables d’une longue histoire qui remonte ici au IVe millénaire avant J.-C., son auteur, agrégé et docteur en histoire, armé d’une solide érudition, offre des repères précieux pour s’y retrouver dans la complexité d’une région pour le moins tourmentée. Celle-ci repose sur des facteurs ethniques, religieux, culturels (les tribus, les langues) et idéologiques, auxquels s’ajoutent les interventions extérieures (Alexandre le Grand, Rome, les Croisades, les occupations française et britannique, la création d’Israël, les ingérences américaines, le jeu de la Russie) que l’auteur décrit avec minutie. Abordant de manière fouillée les évolutions contemporaines, O. Hanne explique les causes de l’émergence islamiste, ce projet mobilisateur après l’abolition du califat (1924), l’échec du nationalisme arabe et les défaites face à Israël. Le délitement et les désintégrations actuels, avec la remise en cause des frontières dessinées au début du XXe siècle, justifient ce constat émis en conclusion : « C’est donc une tautologie de parler de “Moyen-Orient recomposé”, car la région ne cesse de redéfinir ses territoires depuis l’Antiquité. Aucune frontière ne peut satisfaire toutes les communautés en présence, aussi sont-elles récusées dès qu’elles apparaissent. » Puissent les diplomates en tenir compte !
Annie Laurent
Les seuils du Moyen-Orient. Histoire des frontières et des territoires, d’Olivier Hanne, Éditions du Rocher, 2017, 540 pages, 26 €.
© LA NEF n°296 Octobre 2017