Des amis de Jean de Viguerie se sont rassemblés pour offrir au professeur et à l’historien un livre d’hommages, comme le veut la tradition universitaire (1). Comme il se doit dans ce type de « Mélanges », chacun a choisi un thème d’étude, directement ou indirectement relié au professeur de Viguerie. Si Miguel Ayuso offre, par exemple, une remarquable approche hispanique des Deux patries (2), dom Barbeau, de l’abbaye de Solesmes, propose une non moins intéressante étude sur Dom Mabillon pendant que Guillaume Bergerot explore la notion de « Fraternité », etc. Parfaitement conduit par Philippe Pichot-Bravard, ce Liber Amicorum doit donc être lu pour l’hommage en lui-même et pour la qualité des contributions.
Mais il constitue aussi un prétexte à une double interrogation. La première concerne Jean de Viguerie lui-même : quel est le point commun qui traverse son vaste champ d’exploration ? On me permettra de hasarder une réponse. Jean de Viguerie est l’un des rares historiens contemporains à avoir reçu une véritable formation philosophique à l’école de saint Thomas. L’ancien élève de Louis Jugnet en a tiré une qualité de jugement et d’approche qui, si elle n’est pas revêtue du sceau de l’infaillibilité, permet de saisir l’être des choses dans le mouvement de l’Histoire.
La seconde interrogation est plus terre à terre : y a-t-il une école historique née des travaux du professeur de Viguerie ? Je l’ai pensé à un moment. Ce monumental hommage montre plutôt qu’il y a une amitié intellectuelle qui relie des êtres entre eux, habités qu’ils sont des mêmes principes et des mêmes exigences. Lesquels sont féconds comme le démontrent les membres d’une jeune garde qui, inscrivant leurs pas dans ceux de leur aîné, entendent défendre le vrai dans leur domaine respectif. En ce sens, ce Liber Amicorum n’est pas tourné vers le passé, mais il tend aussi vers l’avenir. Il brille d’une double lumière, celle de la piété naturelle et celle de l’espérance. Il convient d’aller s’y désaltérer.
Philippe Maxence
(1) Liber Amicorum Jean de Viguerie, sous la direction de Philippe Pichot-Bravard, Via Romana, 2017, 648 pages, 39 €.
(2) Les deux patries, 1998, rééd en poche, DMM, 2017, 268 pages, 9,95 €. Cet ouvrage avait donné lieu, dans La Nef, à une analyse critique (n°86 Septembre 1998), puis à tout un dossier (n°88 Novembre 1998) ; ces numéros sont disponibles en PDF [nous consulter].
© LA NEF n°299 Janvier 2018