Chronique cinéma Septembre 2018

Le pape, un homme de parole (12 septembre)
Wim Wenders, réalisateur de premier plan, explique que c’est Mgr Vigano, responsable de la communication au Vatican, qui l’a contacté pour réaliser un film sur le pape François. Ensuite, assure Wenders, « le Vatican n’est intervenu en rien sur le film, à aucun moment ». Le documentaire alterne des images d’actualités montrant le pape en face de différents auditoires, dans de nombreux pays, et des entretiens filmés au Vatican, dans les intérieurs ou dans les jardins.
Très vite, dans le film, on est face à ce qui sera sa part la plus originale : le pape filmé en plan rapproché et parlant face à la caméra, c’est-à-dire face aux spectateurs. Maître incontesté de la communication, personnelle comme publique, François captive son auditoire et ses mots l’agrippent sans qu’il puisse s’en défaire. Mais bien plus que la forme compte bien sûr le fond des paroles prononcées par cet « homme de parole ». François parle des sujets universels : la mort, la justice sociale, l’immigration, l’écologie, l’inégalité de revenus, le matérialisme ou le rôle de la famille. Ce ne peut être que volontairement qu’il ne traite pas de questions propres à l’Église ni qu’il ne nomme le Christ, la Vierge ou les saints. Il parle non aux catholiques ni même aux chrétiens mais aux hommes des « périphéries » d’aujourd’hui. S’ils l’entendent, ils ne pourront qu’être remués par cette parole profonde et évidemment sincère.

Dovlatov (19 septembre)
En 1971, à Leningrad, six jours dans la vie de Sergueï Dovlatov (1941-1990), reconnu aujourd’hui comme l’un des écrivains russes majeurs du XXe siècle. Fils d’une mère arménienne et d’un père juif, il a 30 ans à cette époque et travaille comme journaliste pour des magazines au service de la propagande du régime. Mais il rêve avant tout d’écrire un grand livre. C’est un artiste brillant et caustique, qui se bat pour continuer à écrire avec intégrité malgré l’oppression de la lourde machine politique.
Une voix off intervient, celle de Dovlatov. Il indique qu’après le « dégel » des années soixante suivant la mort de Staline, période de relative liberté intellectuelle, a commencé déjà, comme lui-même et ses amis écrivains le constatent, une période de « regel ». Il voit que tout ce qu’il écrit est refusé systématiquement par les éditeurs et aussi que ses simples articles de journalisme sont dirigés jusque dans le détail pour correspondre à la ligne du parti. Il ne s’agit pas d’une répression dure mais d’une série de remarques et d’insinuations qui dirigent insidieusement sa liberté et cherchent à le détourner de son idéal de réalisme et de véracité. Cela est dit de façon remarquable par le réalisateur Alexey Guerman Jr., qui, après plusieurs grands prix internationaux, notamment pour Soldat de papier et Under Electric Clouds, confirme son originalité et sa maîtrise.

François Maximin

© LA NEF n°306 Septembre 2018

 

MARIE DE NAZARETH
film de Giacomo Campiotti
Saje, 2018, 116 mn, 19,50 €.

Il est toujours difficile de mettre en scène Marie ou Jésus. Ce téléfilm italo-allemand est d’un bon esprit avec une mise en scène appliquée, mais se présente trop comme une suite de tableaux hiératiques (difficile de faire autrement). De plus, pour nourrir le scénario – on sait si peu de choses de Marie –, l’auteur a inventé des événements étrangers aux Évangiles, dont une amitié d’enfance entre l’héroïne et Marie-Madeleine assez surprenante.

Patrick Kervinec

© LA NEF n°305 Juillet-Août 2018