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La vraie urgence éducative : former les professeurs

Anne Coffinier

La Fondation pour l’école, reconnue d’utilité publique, s’engage depuis dix ans pour le renouveau de l’école. Elle a investi dès le début de son histoire dans la formation des maîtres, en ouvrant en 2007 l’Institut Libre de Formation des Maîtres, qui est aujourd’hui un acteur reconnu dans l’enseignement privé sous contrat comme hors contrat. Elle a facilité ensuite le lancement de l’École professorale de Paris, dirigée par Philippe Némo, qui se spécialise dans la préparation aux concours de l’agrégation et du Capes.
Cette année, elle a ouvert en plus l’Académie du Professorat, pour former les professeurs des collèges et des lycées, en particulier en mathématiques, français, histoire et géographie. Elle y accueille des enseignants en poste, soucieux de se perfectionner, mais aussi des personnes en reconversion professionnelle ayant un projet clair d’enseignement en secondaire. Les cours ont lieu dans de grands lycées privés parisiens, ou même dans les établissements de professeurs demandeurs, à travers toute la France. Ces formations sont prises en charge financièrement au titre de la formation professionnelle.

Faiblesse des formations
Former les professeurs est une urgente nécessité. La France se distingue au sein de l’OCDE par la faiblesse de la formation initiale et continue de ses professeurs. Inversement, les pays dotés de systèmes scolaires réputés sont aussi ceux dans lesquels les professeurs se forment constamment, en misant sur un compagnonnage professionnel désintermédié, qu’on appelle la formation entre pairs. Un professeur qui identifie qu’un de ses pairs excelle dans tel cours lui demande de venir assister à ses cours et de lui donner des conseils, voire de prendre sa classe pour lui montrer les bons gestes pédagogiques. C’est simple et efficace, mais cela se heurte à un tabou majeur en France : pénétrer dans la salle d’un professeur pour observer sa pratique pédagogique. Le face-à-face pédagogique est central dans la pratique enseignante. Pour autant, il ne doit pas tourner au huis clos systématique.
La formation des professeurs ne doit pas relever d’expert des sciences de l’éducation mais de professeurs riches d’une longue expérience de terrain. C’est ce que fait l’Académie du professorat en français, mathématiques et géographie par exemple. En histoire, l’originalité de la formation est d’établir un lien direct entre la recherche universitaire et l’enseignement. Christophe Dickès, docteur en histoire et journaliste fondateur de StoriaVoce, est responsable du programme. Il sélectionne les meilleurs historiens et les interviewe de manière vivante et structurée devant les professeurs en formation. En effet, que ce soit sur le Moyen Âge ou sur la Révolution par exemple, l’historiographie s’est beaucoup enrichie ces quinze dernières années. Les manuels scolaires, qui ne sont que très rarement écrits par des universitaires, ne sont pas à la page. Les professeurs ont donc besoin d’être mis au contact des chercheurs pour actualiser leurs connaissances. C’est un enjeu d’honnêteté intellectuelle bien sûr mais c’est aussi une respiration salutaire, une stimulation de l’esprit qui motive et valorise les professeurs. Leur métier est épuisant. Ils ont besoin de se ressourcer. « L’historien, dit le grand spécialiste du XVIIIe siècle Jean de Viguerie, ne referme jamais tout à fait ses dossiers. »
La Fondation pour l’école, consciente que les professeurs sont le trésor véritable des écoles et qu’il faut en prendre le plus grand soin, leur propose des rencontres et des cours stimulants avec les meilleurs spécialistes de l’université mais aussi avec des acteurs de terrain. Ainsi, en mai, ce sera à la fois l’universitaire Gilles Ferragu, auteur de l’Histoire du terrorisme chez Perrin, et l’ancien directeur du renseignement militaire, Christophe Gomart, qui viendront partager leur expérience unique sur les nouvelles conflictualités et sur le terrorisme. Les professeurs formés seront mieux armés pour faire comprendre aux adolescents ce qui se joue vraiment dans notre monde en plein bouleversement.

Anne Coffinier

Pour découvrir les formations de l’Académie du professorat et s’inscrire à la carte ou à l’année : www.academieduprofessorat.org ou contacter Virginie De Jaeghere à virginie.dejaeghere@fondationpourlecole.org ou à 01 42 62 76 94.

© LA NEF n°310 Janvier 2019