Une nouvelle traduction du missel romain

Par la constitution apostolique Missale Romanum, datée du 4 avril 1969, Paul VI promulguait un missel « révisé ». Trois éditions typiques (c’est-à-dire normatives en latin) de ce missel se sont succédé : en 1970, en 1975 et en 2002.
Le missel en usage dans les paroisses jusqu’à ce jour était la traduction de la première édition typique. La 3e édition typique n’avait pas encore de traduction en français. Pour réaliser cette traduction, la Commission épiscopale francophone pour les traductions liturgiques (CEFTL) a mis en place une Commission du Missel Romain (COMIRO). Le P. Henri Delhougne, docteur en théologie, moine à l’abbaye bénédictine Saint-Maurice de Clervaux (Luxembourg), a coordonné les travaux. Le nouveau missel, d’après la 3e édition typique (2002), entrera en vigueur le premier dimanche de l’Avent 2020.
Dans l’attente de cette nouvelle traduction, et pour y préparer les prêtres et les fidèles, l’Association épiscopale liturgique pour les pays francophones (AELF) présente le nouveau texte de la messe et les changements intervenus (1). Précisons que ce livret ne présente que la nouvelle traduction de l’ordinaire de la messe. Ne sont pas encore connues les autres traductions (préfaces, propre du temps, propre des saints, etc.).
Un des changements de traduction le plus significatif est dans la traduction du Credo : le terme « consubstantiel au Père » remplace le calamiteux de « même nature que le Père ». L’événement était annoncé depuis quelques années, il est heureusement inscrit dans les textes officiels. En revanche, on peut regretter un manque de coordination entre les traducteurs des deux formules du Credo. Ceux qui ont traduit le Symbole de Nicée-Constantinople traduisent « in remissionem peccatorum » par « pour le pardon des péchés », tandis que ceux qui ont traduit le Symbole des Apôtres traduisent la même expression par « rémission des péchés ».
La nouvelle traduction de l’offertoire était attendue. On remarquera un renouvellement de la prière sur les offrandes qui met en valeur, à deux reprises, la notion de « sacrifice » ; mais ce n’est qu’une proposition puisque l’ancienne formule, plus brève, est toujours possible. Quoi qu’il en soit la nouvelle formulation ne peut corriger ou compléter ce qui manquait déjà à l’offertoire dans les editio typica successives.
De façon générale, dans différentes parties de l’ordinaire de la messe, on remarque ce qu’un prêtre spécialiste de liturgie appelle « le retour du Domine ». Dans les deux prières sur le pain et sur le vin le « Benedictus es, Domine, Deus universi » est traduit intégralement : « Seigneur, Dieu de l’univers », et non simplement comme jusqu’à présent par « Dieu de l’univers ». Pareillement, dans la première préface des dimanches ordinaires, on trouve l’invocation « Seigneur, Père très saint » qui avait été jusque-là omise (pour ne pas faire doublon avec la suivante « Dieu éternel et tout-puissant » ?). Et en d’autres endroits encore (dans la collecte, par exemple).
Dans cette même première préface des dimanches du temps ordinaire, au lieu du « vraiment, il est juste et bon de te rendre gloire, de t’offrir notre action de grâce, toujours et en tout lieu », on trouve en fidélité au texte latin : « Vraiment il est juste et bon, pour ta gloire et notre salut, de t’offrir… ». Déjà dans l’acte pénitentiel, au début de la messe, il y avait eu un ajout « et donne-nous ton salut », qui constitue un ajout par rapport à la traduction en vigueur jusque-là, mais qui est simplement fidèle à l’editio typica.
Dans la prière eucharistique, après le Mysterium Fidei, la traduction du « sanctum sacrificium, immaculatam hostiam », n’est plus omise, comme jusque-là, mais la traduction donnée, « oblation sainte et immaculée », affaiblit le sens littéral : « sacrifice saint, victime immaculée ».
Les spécialistes de la liturgie et les latinistes mesureront, plus en détail, les progrès et les insuffisances de cette nouvelle traduction du Missel de 1969 dans sa 3e édition typique. On peut néanmoins considérer qu’il y a là une amélioration significative par rapport aux traductions en usage.

Yves Chiron

(1) Découvrir la nouvelle traduction du Missel romain, AELF-Magnificat-Mame, novembre 2019, 124 pages. Voir aussi « Commentaire sur la nouvelle traduction française de l’ordinaire de la messe » (25 p.) sur le site Pro
Liturgia.

© LA NEF n°321 Janvier 2020