Le docteur Xavier Dor, victime du Covid-19, est mort le 4 avril. Inlassable défenseur des enfants à naître, son combat, toujours pacifique, était avant tout animé par sa foi.
Xavier Dor est né à Marseille le 30 janvier 1929. Durant ses études de médecine effectuées à Paris, il s’est spécialisé en pédiatrie et, en 1962, il a soutenu une thèse de médecine sur les liens possibles entre la choré-athétose, une maladie neurologique infantile, et la maladie de Parkinson. De 1962 à 1968, il fut chef du service pédiatrique à l’hôpital central d’Abidjan, en Côte d’Ivoire. Rentré en France en 1968, il poursuivit des recherches qui lui permirent de devenir chef de travaux en anatomie et organogenèse en 1975 et d’obtenir un doctorat ès sciences en 1979. Dans le même temps il exerça à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, de 1975 à 1995.
Avant-même le vote de la loi Veil qui légalisa l’avortement, l’association Laissez-les vivre avait été fondée, en 1971, pour informer sur la réalité des avortements alors clandestins et venir en aide aux futures mères. Le docteur Dor avait participé à plusieurs réunions et manifestations organisées par l’association. En 1981, avait été fondée l’association Mère de Miséricorde, pour venir en aide, par l’écoute, la prière et le jeûne, aux femmes tentées par l’avortement ou ayant déjà avorté. L’année suivante était créée l’Association pour l’objection de conscience à toute participation à l’avortement (AOCPA), mouvement non-confessionnel qui se donnait notamment pour but d’« informer le grand public, les responsables politiques, les médias et les militants pro-vie sur les pratiques qui portent atteinte à la vie ou à la dignité de l’être humain non encore né ».
En octobre 1986, le docteur Dor prend l’initiative d’une action différente. Une certaine presse a dit, et répété à l’occasion de son décès, que le docteur Dor fut l’initiateur en France des « commandos anti-IGV ». L’expression « commando » ne correspond pas aux actions qu’il a menées. Il a toujours insisté sur leur caractère « pacifique ». L’association SOS Tout-Petits, qu’il crée alors avec quatre amis, s’est donnée pour but, dès de départ, d’intervenir « à l’endroit même où la loi est appliquée : les centres d’avortement », soit à l’intérieur, soit à l’extérieur, avec pour seule arme la prière et, quand elle est possible, la discussion.
La première « opération », selon l’expression qu’employait le Dr Dor, eut lieu à l’hôpital Tenon, à Paris, le 10 janvier 1987 ; opération volontairement médiatisée, deux photographies de presse accompagnaient la quarantaine de manifestants. Les opérations se sont succédé dans différents établissements de Paris et de province, suivies souvent de poursuites judiciaires et de condamnations. La première peine fut prononcée le 30 mai 1994 par la 11e Chambre de la Cour d’Appel de Paris (1 mois de prison avec sursis et 5000 F d’amende) pour une intervention à la Maternité des Lilas le 16 mai 1992.
Le 27 janvier 1993, Véronique Neiertz, secrétaire d’État aux Droits des femmes, a fait modifier le Code de la santé publique, pour délictualiser « le fait d’empêcher ou de tenter d’empêcher une interruption volontaire de grossesse ». Les condamnations contre le Dr Dor et d’autres manifestants pro-vie se multiplièrent, même lorsqu’ils n’intervenaient pas dans les centres d’avortement mais à proximité. Sans entrer dans le détail des onze condamnations judiciaires endurées par le Dr Dor, on rappellera seulement le mois d’emprisonnement que, presque septuagénaire et sa vue s’affaiblissant de jour en jour, il subit en décembre 1997.
Il avait tenté, en vain, d’obtenir le droit d’asile à la nonciature de Paris. En revanche, le 27 juillet 1998, il put rencontrer Jean-Paul II à Castel Gandolfo. Le pape avait déjà reçu et lu le livre qu’il avait publié quelques mois plus tôt pour témoigner de son engagement (1). Le pape l’encouragea et le bénit : « Vous êtes courageux. Continuez votre bonne bataille. »
Ces paroles avaient réconforté le Docteur Dor. Il a toujours considéré que l’avortement était « la révolte par excellence » contre Dieu. Dans les manifestations de SOS Tout-Petits, les tracts, les banderoles, les affiches contre l’avortement n’allaient jamais sans la prière (les Rosaires pour la vie). Et c’est dans la foi et les sacrements que le docteur Dor trouvait la force de son action. En semaine, tous les matins, il allait à la messe de la chapelle des Lazaristes, rue de Sèvres.
Yves Chiron
(1) Xavier Dor, Le Crime contre Dieu, Éditions de Chiré, 2016 (2e édition révisée et complétée).
© LA NEF n°324-325 Avril-Mai 2020