Terre de Marie (DVD ou Le film chrétien)
Sorti en 2013 en Espagne, le film du réalisateur espagnol Juan Manuel Coetloy a remporté un grand succès. Commençons pour une fois par la dernière partie. C’est un reportage sur Medjugorje, mené caméra au poing parmi la foule des pèlerins. Tout le film, qui montre l’actualité de Marie, converge vers Medjugorje, présenté comme la rencontre avec Marie par excellence. Les partisans de ces apparitions mariales seront enthousiasmés par ce reportage. Les autres ne trouveront pas à y redire, l’enquêteur se contentant de recueillir les témoignages des pèlerins et de quelques pasteurs.
Partisans et méfiants arriveront à ce moment du film après avoir suivi, avec une même émotion, les séquences qui précèdent et qui montrent qu’en effet la terre des hommes est la terre de Marie. Pour rencontrer ces hommes, Cotelo s’est donné un amusant personnage d’avocat du diable. Avocat pas assez malin pour faire perdre la foi à ses interlocuteurs, passionnés de Marie : un PDG, un top-modèle, un missionnaire auprès des prostituées, deux frères prêtres, un médecin ancien avorteur, etc.
Tous, très droits et très simples, disent comment leur vie a été transformée par une rencontre personnelle et intime avec Marie.
À l’origine (DVD ou Netflix)
Miller, arnaqueur de métier, découvre par hasard une autoroute inachevée. Toute la région est sinistrée depuis l’arrêt du chantier. Miller devine ce qu’il pourrait soutirer en pots-de-vin en se faisant passer pour le nouveau chef des travaux.
Xavier Giannoli, qui sait faire naître l’émotion dans la réalité la plus banale, n’a besoin que de quelques images pour camper Philippe Miller, escroc intelligent et énergique, solitaire et mutique. François Cluzet le rend d’autant plus intéressant qu’il reste absolument hermétique. Mais son silence ne tient pas, sur la fin, quand l’escroc qu’on croyait entrepreneur en arrive à vivre comme un entrepreneur qu’on soupçonne d’escroquerie. Il n’a lancé en effet cette incroyable réouverture du chantier que pour palper du « cash ». Mais il soulève un tel espoir dans la région qu’il en vient à se sentir réellement investi de l’achèvement du chantier. Le torrent d’enthousiasme professionnel et sentimental qu’il déchaîne a la puissance des épopées. Avec lui, on en apprend plus sur l’homme que dans les manuels.
Dans cette deuxième partie, volcanique, on peine à se rappeler ce qu’on avait lu en exergue : « cette histoire est fondée sur des faits réels » ! En 1997 en effet, un certain Philippe Berre avait lancé en pleine nature un chantier pour l’autoroute A28, abandonné sous la pression des écologistes ! C’était invraisemblable. Giannoli a fait que ce soit vrai. Vrai comme un western où le grand troupeau à convoyer dans la prairie serait remplacé par des engins de terrassement dansant sous le soleil.
François Maximin
© LA NEF n°335 Avril 2021