Petite Solange (2 février)
Solange, 14 ans, est une adolescente très sentimentale, qui adore ses parents. Un jour, ceux-ci se disputent, commencent à s’éloigner. Tandis que le spectre du divorce se précise, Solange voit son monde se fissurer.
La réalisatrice Axelle Ropert dit avoir voulu faire un vrai mélo parce qu’elle aime pleurer au cinéma, comme on le faisait dans les années 50, alors qu’aujourd’hui les cinéastes refusent les sentiments, craignant d’être jugés « naïfs ».
Les sentiments de la petite Solange, ce sont d’abord ses élans pour ses parents, normalement aimants. Son frère Romain a une attitude réservée (c’est un garçon). Quand les deux adolescents sentent que leurs parents se séparent, ils réagissent chacun à sa manière : Solange souffre extrêmement. La réalisatrice a là-dessus des propos d’une grande justesse, qui tranchent sur le silence généralisé entourant la souffrance des enfants du divorce. « Je fais partie d’une génération, celle des enfants-adolescents des années 80, où les parents se sont mis à divorcer en masse, un vrai phénomène sociologique… Cette histoire qui n’a quasiment pas été montrée au cinéma : quels effets produit le divorce sur un enfant… C’est un sujet dont la richesse me paraît méconnue, voire méprisée. » Et justement, avec une petite actrice d’une aussi merveilleuse sensibilité que Jade Springer, ce film admirable rend palpable la souffrance des enfants, non pas en assommant de douleur mais en invitant dans la ronde des sentiments de la jeune fille.
Un autre monde (16 février)
Philippe Lemesle (Vincent Lindon) est le directeur d’une usine rachetée récemment par une multinationale. On le découvre discutant avec sa femme (Sandrine Kiberlain) et leurs avocats de leur prochain divorce. Lemesle ne comprend pas pourquoi sa femme veut la séparation : il ne lui a jamais rien refusé. Celle-ci réplique que le nouveau travail de son mari a pris toute leur existence et que sa vie à elle est devenue un enfer.
On rentre dans l’usine, où Lemesle parle familièrement à tous les employés. Vincent Lindon est parfait dans ce rôle. Dans le groupe il a la réputation du meilleur manageur d’hommes et c’est dans son usine que règne le meilleur dialogue social. Oui, mais… Mais c’est le groupe qui décide de la vie de chacun des sites répartis dans le monde. Il y en a plusieurs en France, que dirige depuis Paris une haute cadre (Marie Drucker) aussi jeune et belle qu’impitoyable, et qui confirme la décision de la direction mondiale : réduire les effectifs de 30 % ! Lemesle et un autre directeur préparent une contre-proposition. Il faut voir comment le PDG mondial, en vidéo, reçoit ce texte. Ce jeu de contraintes et de résistances rythme le suspense du film qui se suit avec passion. Ainsi avec le fils de Lemesle, où l’étonnant Anthony Bajon sidère en grand enfant psychiquement malade des affres de ses parents. Finalement c’est la famille qui gagne. Par forfait, sans doute mais qui s’en plaindrait ?
François Maximin
© LA NEF n°344 Février 2022