Homme-femme : la nature a raison !

Dans un livre passionnant et accessible (1), le professeur René Écochard revient sur l’apport des neurosciences pour expliquer comment notre biologie influence nos comportements d’hommes et de femmes… à l’opposé de ce qu’affirme la théorie du genre.

Le cerveau est un génie. Il grandit avec nous, se façonne, opère, à chaque moment de la vie, des mécanismes, des échanges de fluides, des libérations d’hormones si bien qu’il est à la fois un réceptacle de notre éducation et de notre évolution et un moteur prédisposé depuis notre naissance. Nous naissons homme ou femme, notre cerveau est marqué, comme un sceau, de cette qualité et une alchimie étonnante, un jeu savant d’hormones, comme une machine, fonctionne.
René Écochard n’est pas un polémiste et ce livre de manière posée, calme, avec un naturel apaisé, assoit des idées conservatrices sur la famille, le couple, la fonction de la femme et de l’homme, s’opposant à leur égalité, soutenant, en revanche, leur sainte et belle complémentarité, entre l’amour et la guerre, Mars et Vénus. René Écochard est des nôtres, et par conséquent, opposé à la théorie du genre, soucieux de ne pas adhérer aux délires progressistes, aux théories modernes et déconstructionnistes autant du monde ouvert de Davos que du wokisme. Le lecteur serait-il craintif quant à lire un livre sur les neurosciences qu’il devrait se rassurer derechef : le ton est simple, accessible alors même que l’on trouve en fin de volume un appareil conséquent de notes et une biographie bien chargée. Mais n’est-ce pas là le propre d’un grand scientifique que de faire parvenir le lecteur lambda dont nous sommes à la clarté des idées et du propos en ayant mâché une quantité complexe de données ?
Le professeur place le débat du côté de la science, il faudrait aussi l’éclairer par les enjeux politiques et économiques d’une société éclatée, liquide, libérale, trop libérale, de consommateurs. Soit. Il faudrait aussi rétablir les enjeux intellectuels de ces dernières années. Le progressisme sociétal revendique, au nom des droits de l’homme, la liberté absolue de l’individu au nom même de ses droits et même de ses caprices : rien ne doit empêcher la liberté de l’homme, pas même la nature qui, injuste, œuvre comme la fatalité. On naît homme, par hasard, sans l’avoir choisi. Malheur ! Cette espèce de déterminisme biologique est insoutenable pour les progressistes.

Distinguer nature et culture
Son deuxième combat est de vouloir distinguer nature et culture, de les séparer drastiquement, comme deux choses qui n’ont rien à voir, et d’en faire pour l’une quelque chose de dépassé, et pour l’autre, une sorte de revendication à la carte dont on choisit tout à l’envi et selon ses désirs. Ainsi un petit garçon peut devenir une petite fille, bien qu’ayant un pénis, s’il décide de se maquiller ; le père est une fonction symbolique ; la famille peut bien, au nom de la modernité et des droits, être constituée de deux mamans. Le règne de l’individu.
Le livre du professeur Écochard cherche à présenter trois points principaux : nés homme ou femme, notre biologie détermine une partie de nos comportements ; notre éducation, notre culture, notre évolution dans la société sont arrimés à notre sexe disposé à la naissance, comme pour l’épouser ; l’homme et la femme ne sont pas indifférenciés mais complémentaires. « Les mêmes hormones masculinisent ou féminisent le corps, mais aussi l’esprit. » Il y a une cohérence entre un corps masculin et une personnalité masculine, d’où la détresse profonde d’une société où l’on répète que l’on est physiquement un homme mais pas psychologiquement, que ce qui est naturel est un stéréotype, donc atroce et oppressant ; où l’on distingue le genre et le sexe et même plus grotesquement « l’identité de genre » et l’« expression de genre ». Alors même que la société moderne nous invite, au nom de vagues droits, à choisir, la nature prend le contrepied de la célèbre phrase de Beauvoir et nous enjoint à observer ce précepte : on devient homme parce que l’on est né homme.
Sans parler de déterminisme, le professeur dit bien que « les sociétés humaines ne sont pas structurées par la seule génétique : le libre arbitre enrichit la vie humaine », et d’ajouter que là où les progressistes nient l’importance de la nature et la plénitude de la culture, il faudrait donc envisager une sorte de concorde entre la détermination biologique et notre manière d’être un homme, une femme, fondée par notre éducation et notre parcours personnel : « le processus de masculinisation du cerveau de l’homme est biologique mais aussi éducationnel : l’éducation participe au développement du donné naturel que le chromosome Y établit directement ou par l’intermédiaire de la testostérone. »

L’évolution des garçons et des filles
La première partie est consacrée aux enfants et à leur évolution. Les filles ont une prédominance à l’empathie. Cela s’explique par le fait que les garçons et les filles « ont un fondement naturel, lié pour une part au taux de testostérone plus élevé chez les garçons que chez les filles dans la période fœtale ». Dès l’enfance, pouvons-nous lire, « le cerveau des filles et des garçons se développent de façon différente sous l’influence des jeux qui les attirent, des interactions avec leur entourage et du regard de ceux qui les entourent, qui leur indique leur horizon de femme ou d’homme. Tout cela concourt à permettre les développements d’une personnalité dont les traits féminins ou masculins se révèlent peu à peu ». Il appert donc que tout se joue dès la conception de l’enfant, que l’enfant, fille ou garçon, est disposé par son sexe à telles ou telles caractéristiques qui vont influencer son comportement, ses goûts, ses idées. La mécanique ne fait qu’opérer, en avant la musique !
La partie la plus pertinente est celle qui traite de la famille. À l’heure où l’on explique qu’une grand-mère peut être un père, à l’heure de la famille recomposée, monoparentale, modèle du parfait capitalisme, et du mariage pour tous dans sa version 2.0, les informations du professeur nous réjouissent. La famille est l’illustration parfaite d’une institution culturelle, civilisationnelle, arrimée, calquée sur la nature, sublimant l’instinct de reproduction et le comportement animal de l’homme et de la femme par un sacrement et une institution. Comprendre qu’une alchimie au niveau du cerveau s’opère entre les mariés, entre la mère et son enfant, entre le père et son enfant, confirme et infirme la défense de la famille selon le droit naturel. Un homme tend à devenir père et le père, cet homme changé, transformé chimiquement, est irremplaçable. Le lien conjugal, le mariage, institution culturelle, est en parfaite harmonie avec le sentiment amoureux, naturel, entre un homme et une femme, si bien qu’au moment de la grossesse « plus les changements hormonaux observés chez la mère sont amples, plus ceux observés chez le père le sont aussi ». Épatant !

Le père remis à l’honneur
Le père reprend, sous les observations du professeur, quelques couleurs. Alors qu’on l’avait réduit à être une fonction, voilà que l’homme devenant papa se transforme, « l’équilibre hormonal du père se modifie-t-il au cours de la grossesse de son épouse, ou encore la vue du sourire du nouveau-né déclenche chez ses parents une bouffée d’ocytocine, hormone de l’attachement ». Comment cela se produirait, même au nom des droits de l’individu, avec une grossesse sous GPA ? Pendant les premiers mois de l’enfant, le père ressent moins de testostérone, cette baisse l’incite à rester dans le nid familial, ce qui a servi au cours de l’évolution à inciter le père à protéger son enfant contre des menaces. Le modèle du « daron » protecteur n’est pas qu’un stéréotype, il est biologiquement posé. Cela est admirable : devenir père n’est pas simplement un apprentissage par une méthode, un Que sais-je sur la paternité, un Être papa pour les nuls, mais au contraire s’opère naturellement. « Plus tard même, l’homme subissant une sorte de métamorphose, voyant sa femme allaiter, bénéficie lui aussi d’un mouvement hormonal qui renforce son attachement à son épouse et à leur enfant. Une même hormone sert donc de vecteur pour nourrir l’enfant et pour renforcer les liens. »
Ce livre sera donc un vade-mecum nécessaire à tous les catholiques partisans du droit naturel et ceux qui justifieront les principes qui sont les leurs par des données factuelles et scientifiques propres à nous rassurer sur nos idées et notre combat.

Nicolas Kinosky

(1) René Écochard, Homme Femme. Ce que nous disent les neurosciences. La nature a raison ! Nos différences sont des richesses, Artège, 2022, 240 pages, 17,90 €.

© LA NEF n°346 Avril 2022