Decision to leave (29 juin 2022)
Hae-Joon, détective chevronné, enquête sur la mort suspecte d’un homme survenue au sommet d’une montagne. Bientôt, il commence à soupçonner Sore, la femme du défunt, tout en étant déstabilisé par son attirance pour elle.
On ne repérera sans doute pas immédiatement que ce film coréen est un remake du Sueurs froides de Hitchcock. Mais l’histoire et les personnages se laissent bientôt reconnaître et l’élégant Ko Gyung-Pyo, notamment, a sur le mode asiatique toute la distinction et l’élégance de James Stewart. Plus encore l’éblouissante Tang Wei, vu dans Skyfall où elle était une James Bond Girl d’anthologie, parvient à faire oublier la blondeur mythique de Kim Novak. Sueurs froides, plus souvent appelé de son titre original anglais Vertigo, est le film le plus cité de Hitchcock parce qu’il a la réputation, méritée, d’avoir la plus parfaite mise en scène. Osez le refaire suppose donc un réalisateur très sûr de lui et de son art, sous peine de s’exposer au ridicule. Voilà une dérive où ne risque pas de s’abîmer Park Chan-Wook parce qu’il y a beau temps que le metteur en scène coréen a fait la preuve de sa maîtrise de son originalité. On se rappelle comment il était entré dans la lice à Cannes avec Old Boy, qui avait eu le prix du jury en 2004. Deux autres prix sont venus récompenser ses films avant ce Decision to leave que d’aucuns voulaient pour la palme d’or. Ce sera le prix de la mise en scène, qui lui convient davantage.
Elvis (22 juin 2022)
Pour retracer la trajectoire d’Elvis Presley, étoile ou comète, le réalisateur Baz Luhrmann a choisi de la regarder à travers le prisme de ses rapports compliqués avec son impresario, l’étrange « colonel » Tom Parker. C’est délibérément le point de vue de ce dernier qui est choisi. Le film explore ainsi sur une vingtaine d’années les relations houleuses entre les deux hommes, depuis l’ascension explosive de Presley jusqu’à son intronisation comme star planétaire. Et pendant ce temps, rappelle le film, l’Amérique connaît les bouleversements socioculturels majeurs qui menacent son innocence d’avant-guerre. Le film n’oublie pas non plus un personnage important : Priscilla Presley. Elvis et elle divorcèrent mais elle fut sa seule femme.
Baz Luhrman, le réalisateur australien, est auteur de films immenses, comme Romeo+Juliette ou Moulin Rouge où il a développé une esthétique tout de flammes et de rouge qui serait bien nommée « baroque and roll ». Pour Elvis il a choisi une esthétique plus sage où le génie de la scène d’Elvis, qui dirige ses fans dans leurs fauteuils depuis son micro, est magnifié par le jeu mimétique fascinant de son interprète Austin Butler. Le résultat est à l’honneur d’Elvis que Butler fait revivre de merveilleuse façon. Il est aussi à l’honneur de Tom Hanks qui se fond si bien dans son personnage qu’on met du temps à le reconnaître.
François Maximin
© LA NEF n°349 Juillet-Août 2022