École à la maison : voyage en absurdie liberticide

La loi du 24 août 2021 contre le séparatisme, visant notamment la réglementation drastique de l’école à la maison, entre en application en ce mois de septembre. Loi mal discutée et mal rédigée, elle provoque, sous prétexte de radicalisme, des situations absurdes pour nombre de familles. Explication.

Stupéfaits, nous avons découvert, mon épouse et moi, en écrivant notre livre L’école à la maison, une liberté fondamentale (1), que les principaux chercheurs français en radicalisation, au sein de nos meilleurs instituts de recherche, n’avaient aucun chiffre pour étayer cette thèse du radicalisme. Pas de chiffres à l’Institut des Hautes Études de la Défense nationale ou du ministère de l’Intérieur… Tous nous ont affirmé que l’école à la maison n’était pas du tout un sujet pour eux. Même le conseiller spécial du ministre Jean-Michel Blanquer nous l’avoua : « pas-de-chiffre ». Alors pourquoi diable le président de la République a-t-il voulu restreindre cette liberté fondamentale des parents, premiers éducateurs de leurs enfants ?
Réclamés par les députés pendant près de onze mois, les rapports de la Direction générale de l’éducation scolaire (Dgesco) sur l’instruction en famille ont été rendus publics après le vote de la loi, obligeant la représentation nationale à voter à l’aveugle. Ils indiquaient que seulement 0,09 % des enfants instruits en familles posent des difficultés, sans mention d’un quelconque radicalisme. Un chiffre à comparer avec les 98 % des contrôles académiques annuels réussis. Absurde.
Quid de la socialisation ? Les universitaires spécialistes des sciences de l’éducation parviennent au même consensus : « les enfants instruits en famille sont aussi bien, voire mieux socialisés que les enfants des écoles publiques. » L’école à la maison était déjà en pleine croissance au niveau mondial avant la pandémie et s’est encore développée depuis dans le monde entier, mais notre pays, la France, est le seul à vouloir l’interdire, rejoignant l’Arabie saoudite, le Pakistan, Cuba et la Chine. Absurde.
Les familles étaient prêtes à aller jusqu’au bout pour défendre leurs enfants, leur liberté et leur autorité parentale. Elles se sont mobilisées à un niveau d’une ampleur et d’une longévité exceptionnelle. Elles ont pétitionné, obtenu de nombreux articles dans la presse et le soutien de députés sur tous les bancs de l’Assemblée. Ces familles, réunies en groupes variés dans les réseaux sociaux, se sont organisées pour la bataille, mieux que n’importe quel cabinet de lobbying avec pignon sur rue ! Elles ont monté une myriade de collectifs et d’associations. La nôtre, Liberté éducation (2), lancée le 8 décembre 2020, est devenue nationale en quelques jours, atteignant 1600 familles adhérentes en seulement un an, auditionnée à l’Assemblée et au Sénat, rejoignant l’inter association nationale de l’instruction en famille.
Le jour du vote à l’Assemblée, l’article interdisant l’instruction en famille risquant d’être rejeté, le gouvernement négocia dans les couloirs avec les députés frondeurs, passant un amendement de dernière minute. Il proposait que les familles exerçant déjà ce libre choix puissent continuer par dérogation pendant deux années supplémentaires. Soixante-dix-sept députés restèrent de notre côté, mais la loi instituant un régime d’autorisation fut votée. Ce qui allait occasionner 2000 refus, dont une grande part pour les petits derniers de 3 ans dans des fratries déjà instruites en famille. Absurde.
La loi prévoyait une clause présentée aux députés devant permettre toutes les situations, « la situation propre à l’enfant motivant le projet éducatif ». Mais personne n’est capable de définir un « bon projet » adapté à l’enfant. Ceci entraîna de nombreuses disparités selon les académies. Auditionné à l’Assemblée le 3 août, le ministre lui-même reconnut le problème : « dans certains départements, c’est un non très massif. » Nous en sommes témoins, avec 400 refus dans notre association, dont 31 % dans l’académie de Toulouse. Les motifs donnés sont bien souvent… absurdes. Ils vantent encore la socialisation à l’école et les mérites de l’Éducation nationale. Certaines académies demandent même d’apporter la preuve que l’enfant ne peut être scolarisé : absurde et illégal.
Avec notre avocat, une première famille a attaqué son refus devant le tribunal administratif de Toulouse, pour leur petite dernière de 3 ans au sein d’une fratrie. Ils ont gagné, première victoire décisive qui ferait jurisprudence. Enfin, les leaders européens de l’école à la maison, avec le Global Home Education Exchange, lancent un Sommet européen de l’instruction en famille, les 7-8 octobre à Paris, en partenariat avec le Salon Libsco organisé au même endroit le 8 octobre par la Fondation pour l’École. Cette année, la France n’a pas été choisie au hasard. Preuve que face à l’absurdité de cette loi, la bataille pour cette liberté continue.

Jean-Baptiste Maillard

(1) Jean-Baptiste et Marie Maillard, L’école à la maison, une liberté fondamentale, Artège, 2021, 248 pages, 18,90 €.
(2) Site : www.liberteeducation.com