En France, le mariage recule, le PACS progresse, les divorces se multiplient. Le nombre des procès en nullité de mariage augmente. Dans ce contexte, la préparation au mariage s’avère essentielle. Les papes ont insisté sur un certain nombre d’éléments à ne pas négliger ; un document romain tout récent le rappelle, mais il est hélas non accessible encore en français !
Une préparation nécessaire. Il n’est pas si lointain le temps où la préparation au mariage se réduisait à deux rencontres avec le prêtre qui devait vous marier : une première pour remplir le dossier administratif du mariage et une seconde pour recevoir le sacrement de pénitence. Nous étions encore en temps de « chrétienté » et les valeurs chrétiennes allaient de soi : indissolubilité, fidélité, ouverture à la vie, liberté du consentement. À âge égal, les personnes étaient sans doute plus matures qu’aujourd’hui et psychologiquement moins fragiles. En tout état de cause, à partir des années 1950, le Père Caffarel a lancé les CPM : « Centres de Préparation au Mariage ». Depuis lors, le Magistère de l’Église ne cesse de dire qu’une sérieuse préparation est nécessaire (1) car le sacrement de mariage ne s’improvise pas (2).
Les enjeux. Saint Jean-Paul II n’a pas eu peur de dire que « la stabilité du lien conjugal et l’heureux maintien de la communauté familiale dépendent pour une bonne part de la préparation des fiancés à leur union » (3). En effet, plus les mariages sont bien préparés et moins il y a de « procès en nullité de mariage » (procédure qui vérifie la validité ou non de l’échange des consentements le jour du mariage). Ainsi une bonne préparation est un « antidote empêchant la multiplication des célébrations matrimoniales nulles ou inconsistantes » (4).
La famille. Soyons honnêtes et réalistes : la préparation au mariage des futurs conjoints est essentiellement assurée par l’éducation reçue de leurs parents. Quelques mois avant la célébration du mariage, les institutions ecclésiales ne font qu’ajouter une petite touche à tout ce qui a déjà été donné. La famille apprend à aimer, à servir, à se donner, à comprendre qu’en s’engageant une personne ne perd pas sa liberté mais, au contraire, la met en œuvre et la donne. La famille enseigne que l’amour n’est pas qu’un sentiment mais qu’il est surtout un engagement de la volonté, un choix délibéré de la raison.
La chasteté et la continence. De nos jours la plupart des fiancés vivent d’abord « en couple » avant de se marier (donc cohabitation et fornication). Un certain nombre de « couples » ne parviennent pas jusqu’à un mariage mais se séparent en chemin. Petit à petit, la contraception a inculqué la dissociation entre sexualité et procréation, mais aussi entre amour et sexualité. En dehors de la malice morale du concubinage, peut-on penser que les fiancés sont vraiment libres s’ils se donnent sexuellement l’un à l’autre avant de se marier ? La chasteté et la continence permettent aux fiancés de se connaître et de se choisir plus librement (5). Elles leur apprennent que la relation sexuelle n’est pas l’unique expression de l’amour conjugal. Elles facilitent une réflexion rationnelle apaisée : sommes-nous faits l’un pour l’autre ? Arrivera-t-on à construire ensemble une communauté de vie et d’amour jusqu’à la mort ? Car l’adage est bien connu : « l’amour rend aveugle et le mariage rend la vue. »
Une question de bon sens. « Marie-toi à ta porte avec quelqu’un de ta sorte. » Sans entrer dans un quelconque communautarisme non chrétien, il faut bien avouer que le bon sens nous invite à accueillir cette sagesse populaire. La vie commune présente suffisamment de difficultés en elle-même pour qu’il ne semble pas nécessaire de choisir un conjoint d’une autre religion que la sienne, d’un tout autre milieu social que le sien, etc. Même s’ils se trouvent de rares exceptions à cette règle.
Des points d’attention. « Le mariage c’est comme une omelette : pour la réussir il faut deux bons œufs de poule. » Il convient donc de vérifier la solidité, la structure, la qualité de chaque fiancé : tant corporellement, psychologiquement que spirituellement. Beaucoup de couples mariés souffrent ou explosent à cause de blessures psychologiques non traitées. Il ne suffit pas de savoir ce qu’est le mariage ou de vouloir se marier pour réaliser un bon mariage, il faut aussi pouvoir mettre en œuvre une vie maritale et familiale. Pour s’assurer de la qualité de « l’œuf de poule », il convient de recevoir les fiancés en couple mais aussi individuellement durant la préparation (6). L’avis des familles des fiancés n’est pas non plus à négliger de la part du prêtre responsable de la préparation.
Une responsabilité de tous les fidèles. Il est très clair que la préparation au mariage ne repose pas uniquement sur les épaules des pasteurs (évêques et prêtres) mais sur l’ensemble des fidèles : laïcs, clercs, personnes consacrées (7). Chacun devrait se mettre au service des jeunes et des fiancés en fonction de ses talents, charismes, disponibilités, devoirs d’état (8). Spécialement les couples déjà mariés et plus expérimentés.
Un chemin de type catéchuménal. En cette année « Famille Amoris laetitia », le pape François insiste beaucoup sur une dimension catéchuménale (9) : la préparation au mariage est une occasion d’approfondir la rencontre des futurs époux avec le Christ, de parfaire leur connaissance du contenu de la foi catholique (10). C’est un temps d’évangélisation, une étape sur leur chemin de foi (11). Tout récemment un document du Dicastère pour les Laïcs, la Famille et la Vie est revenu sur ce point (12). Il insiste en particulier sur le suivi des couples mariés (n. 74).
Aider les jeunes à se marier. Les personnes se marient de plus en plus tard. L’âge moyen des personnes qui se marient a progressé de huit ans depuis 1970. Il est aujourd’hui aux environs de 30 ans. Beaucoup de célibataires souffrent de ne pas trouver leur conjoint. Nous devrions tous nous faire serviteurs des célibataires en les aidant à se rencontrer. Il en va de la santé de l’Église et de la France de demain.
Abbé Laurent Spriet
(1) Code de Droit canonique (CIC), 1983, can. 1063.
(2) Cf. les exhortations apostoliques Familiaris consortio, n. 66, et Amoris laetitia, n. 205.
(3) Cf. Discours du pape Jean-Paul II au Tribunal de la Rote romaine du 24 janvier 1981.
(4) Cf. Discours du pape François au Tribunal de la Rote romaine du 21 janvier 2017.
(5) Cf. Amoris laetitia, n. 206.
(6) Cf. Discours du pape Benoît XVI au Tribunal de la Rote romaine du 22 janvier 2011.
(7) Cf. Discours du pape François au Tribunal de la Rote romaine du 29 janvier 2018.
(8) Cf. Discours du pape François au Tribunal de la Rote romaine du 21 janvier 2017.
(9) Cf. Discours du pape François au Tribunal de la Rote romaine du 22 janvier 2016.
(10) Cf. Discours du pape François au Tribunal de la Rote romaine du 21 janvier 2017.
(11) Cf. Amoris laetitia, n. 207.
(12) Itinerarios catecumenales para la vida matrimonial, orientaciones pastorales par las iglesias particulares, 15 juin 2022. Ce texte n’est disponible actuellement qu’en italien et en espagnol.
© LA NEF n° 353 Décembre 2022, mis en ligne en janvier 2023.