Cinéma Février 2023

La famille Asada

25 janvier
À l’âge de huit ans, Masashi Asada a reçu de son père un appareil photo dont il se servira abondamment, jusqu’à faire, adulte, des études de photographie. Il immortalise alors les membres de sa famille dans les situations, avec décors et costumes, dont ils ont toujours rêvé : son père en pompier, sa mère, en épouse de yakuza, son frère aîné en pilote de Formule 1. Masashi n’a pas besoin d’être immortalisé dans son rêve car celui-ci est déjà réalisé : il est vraiment photographe ! Photographe reconnu qui plus est car son livre des phantasmes familiaux a reçu le prestigieux prix « Kimura Ihei ». Les répliques de ses photos, dans le film, jouées par les acteurs, sont très proches des originaux et partant très belles.
Encouragé par ce premier succès, Masashi ouvre son art à d’autres familles et il réussit là encore des photos magnifiques. Mais ce n’est pas encore la deuxième partie du film, qui s’ouvre sur un événement tragique, dont tout le Japon sort bouleversé, le terrifiant tsunami de 2011 sur la côte pacifique du pays. À l’image on découvre, reconstitués, les décombres de cette catastrophe. Masashi va y trouver un pouvoir de la photo qu’il ne pouvait pas imaginer. Sans trop dévoiler cet aspect très émouvant, il faut relever comment Masashi, de voyeur qu’il était dans son objectif, devient passeur d’émotions extrêmement précieuses, qui donnent à son métier un lustre inattendu et à son matériau des images au pouvoir grandiose. L’émotion se fait alors bouleversante.

Tu choisiras la vie

25 janvier
Une famille juive haredim (ultra-orthodoxe) d’Aix-les-Bains se rend comme chaque année dans une ferme du sud de l’Italie pour une tâche sacrée : la récolte des cédrats. Le film évoque à peine le sens de cette cueillette mais on comprend qu’elle est liée à la fête de souccot (« fête des tentes ») où le cédrat, cette espèce de gros citron sans jus, entre dans la composition du bouquet de la fête. Esther, la fille du rabbin (Lou Delaâge), remet en cause les contraintes imposées par sa religion. Elle fait la connaissance d’Elio, le propriétaire de la ferme (Riccardo Scamarcio). Avec ses pratiques incompréhensibles, cette famille juive emmenée par le père rabbin est montrée sans acrimonie et on devine que l’auteur du film, le comédien Stéphane Freiss, parle de ce qu’il connaît. Le portrait flatteur qu’il fait d’Esther montre qu’il l’approuve de tourner le dos à sa tradition. C’est son double héritage que Freiss met ainsi en scène, celui de sa mère, haredim, et de son père, agnostique. La part d’invention de l’auteur consiste à charger aussi Elio d’un lourd héritage, en l’occurrence la terre de son père, et à le faire lutter contre ce poids du passé, ce qui le rend compatissant aux efforts d’Esther pour se libérer. Pour son premier film comme réalisateur, Stéphane Freiss, révèle un talent et une sensibilité qui produisent maintes délicatesses, formant un écrin de prix pour le jeu des acteurs.

François Maximin

DVD à signaler

THE CHOSEN

2 saisons de 8 épisodes, Saje Distribution, 19,99 €. Saison 2 disponible en DVD à partir du 16 février 2023.

Si la première saison de The Chosen a su vous séduire, la deuxième – à paraître en DVD le 16 février – vous convaincra tout autant : elle s’inscrit dans la plus fidèle continuité à la première. Et on lui en est reconnaissant ! Car cette série qui retrace la vie publique du Christ à partir de la lettre et de l’esprit des Écritures, nous a conquis. Elle réussit notamment le pari fou de nous faire vivre, le temps de quelques épisodes, avec Jésus et ses disciples. Elle nous fait rencontrer le Christ, elle nous le donne comme très humain sans jamais qu’il ne soit rabaissé à moins que lui-même. Loin du Jésus un peu désincarné et distant, cantonné à des paroles purement évangéliques, que le cinéma nous a déjà présenté, ce Christ est de chair et d’os, il a l’humour espiègle, le sourire heureux d’un enfant quand il opère un miracle et transforme une existence, l’amour immense de l’homme-Dieu pour les hommes qu’il croise et qui ont tant besoin de lui.
La série parvient également à si bien nous contextualiser certains passages parfois arides et courts des Évangiles (par exemple les guérisons accomplies par Jésus) qu’elle nous en donne une bien meilleure connaissance du cœur ; elle nous fait pénétrer ces épisodes de la vie du Christ avec une profondeur de ressenti et d’identification peu commune. Elle est aidée en cela par des acteurs qui campent admirablement le Christ et son entourage et par une belle esthétique de l’image. Par cette plongée dans la Galilée du premier siècle, dans la vie terrestre du Fils, devant le spectacle de la joie et de la foi extraordinaires suscitées chez ceux qui attendaient si désespérément leur Messie et qui surent le reconnaître comme tel, nous sommes face à une réelle expérience de prière, et nous nourrissons notre imaginaire spirituel. Nous recommandons chaleureusement cette belle série qui réalise l’ambition assez exorbitante de nous rapprocher un peu de notre Sauveur !

Élisabeth Geffroy

SAUVÉE PAR L’AMOUR

Film de D.J. Caruso avec Tom Lewis et Abigail Cowen, Saje Distribution, 2023, 2h09, 19,99 €.

Voici un film « chrétien » américain qui a l’originalité de se dérouler en Californie en 1850, qui s’apparente donc à un western ! Ici le héros, Michael, ne joue pas des révolvers comme John Wayne, c’est un humble fermier et un chrétien fervent… qui sait néanmoins se défendre avec ses poings quand il le faut ! Lorsque Michael croise Angel, prostituée notoire, il sait qu’il en fera son épouse. Mais Angel est une jeune femme particulièrement abîmée par la vie, vendue encore adolescente dans un bordel à la mort de sa mère. Si Michael réussit à la persuader une première fois de le suivre, le chemin de conversion et de rédemption d’Angel sera long et difficile, parsemé de rechutes. Angel, en effet, ne croit pas pouvoir sortir du gouffre où la vie, cruelle, l’a jetée. Un beau film à réserver aux adultes, certaines scènes étant assez crues.

Patrick Kervinec