Revue d’une pièce de théâtre qui sera jouée pendant le Festival d’Avignon (du vendredi 7 au samedi 29 juillet 2023, Théâtre Tremplin, 14h30, 7 rue du Bon Pasteur).
Quoi qu’objet d’une vénération ancienne et populaire, on en sait trop peu sur Saint Etienne pour en tirer une biographie en forme d’épopée tragique. La pièce de théâtre Je verrai le Ciel ouvert fait donc bien mieux que cela : se saisissant des bribes de vies et morts relatées dans l’Ecriture, la pièce les orne d’une imagerie profonde et saisissante, et d’un presque rien, elle révèle des pépites qui s’éclairent mutuellement pour dire, déjà, presque tout, avec la force concrète du théâtre. Un comédien, un musicien, de discrets éclairages, quelques panneaux de feutres et une poignée de tabourets suffisent pour porter un texte étonnant d’intensité, tant la symbolique y est substantielle et raffinée. Sur scène, le comédien Cédric Daniélo poursuit les oiseaux et compte les moutons, il est tour à tour un simple d’esprit qui retient la pitié du jeune saint, un vieillard dont le rire « coule comme celui d’une jeune fille, dans les rues de Jérusalem », Paul « impatient de jambe et d’esprit », ou encore Rabbi Gamaliel dont les Actes des apôtres nous donnent un aperçu. Cette plongée dans l’ambiance de Jérusalem quelques années après la mort du Christ ne ressemble en rien à un exposé historique ou à cours de catéchisme : c’est véritablement un drame humain saisi dans la temporalité de l’évangile. Par l’intelligence des mots de Juliane Stern – adroitement contrepointés de la musique de Bach, Bloch, Bartok et Ysaÿe – tout, en effet, semble dit : la violence et la tendresse, la lutte et le pardon, la solitude et la communion, les malheurs et l’insurrection de la grâce. Selon sa propre fréquentation des textes bibliques, le spectateur y entendra la méditation qu’une âme de poète peut tirer de pages qu’on croyait déjà trop bien connues, ou bien y verra un faisceau de lumières pointant vers une parole encore au-delà, comme un vibrant invitatoire à la vie spirituelle incarnée.
Cette pièce de théâtre est le fruit d’une commande de l’évêque de Saint-Étienne pour les 50 ans de son diocèse, en mai 2021. Monseigneur Bataille concrétisait ainsi le souhait de rendre la présence du saint patron du diocèse « plus proche, plus vivante » en demandant aux artistes de « lever un coin de voile sur ce témoin magnifique de foi, d’espérance et de charité », faisant le pari d’une création contemporaine. Un pari doublement réussi, en premier lieu parce que les spectateurs sont touchés par ce spectacle, comme en témoigne ce commentaire de Sébastien : « Avant, je ne connaissais Étienne que de nom et l’évangile me paraissait poussiéreux. Maintenant, je peux dire que j’ai partagé les joies et les peines du métier d’oiseleur avec Étienne. Puis, j’ai découvert son cœur. Au Temple, tout a changé. Le ciel s’est ouvert, j’ai rencontré le Christ. »
Pari réussi également parce que de nombreuses paroisses ont ouvert leurs églises pour y accueillir une représentation, au-delà du diocèse de St Etienne : à Lyon, Bourges, Paris et jusqu’aux Ostensions limousines le Théâtre pneumatique est en tournée, s’exerçant avec flamme à animer la statue de pierre du premier martyr de l’Eglise. Désormais changé en oiseleur, Etienne circule d’un pas agile à la rencontre des spectateurs.
Cet été, Je verrai le ciel ouvert sera donné durant tout le mois de juillet (du 7 au 29, sauf 12,18 et 26, jours de relâche) au Festival off d’Avignon, 14h30 au Théâtre Tremplin. Réservation : 04 90 85 05 00.
La rédaction
© LA NEF, exclusivité internet, mis en ligne le 20 juin 2023
Renseignements : theatrepneumatique.fr