Bienfaits du confessionnal

Il faut bien avouer que, depuis quelques décennies, les confessionnaux des églises servent plus de placards à balais que de lieux où prêtres et laïcs célèbrent le sacrement de pénitence. Le Code de Droit canonique établit pourtant que « les confessions ne seront pas entendues en dehors du confessionnal, à moins d’une juste cause ». Et si le temps était venu d’un petit éloge du confessionnal ?

Que demande l’Église ? Pour entendre les confessions, l’Église catholique de rite latin préfère le confessionnal. Le Code de Droit canonique le dit explicitement : « Pour entendre les confessions sacramentelles, le lieu propre est l’église ou l’oratoire (§1). En ce qui concerne le confessionnal, la conférence des Évêques établira des règles, en prévoyant toutefois qu’il y ait toujours dans un endroit bien visible des confessionnaux munis d’une grille fixe séparant le pénitent du confesseur et dont les fidèles qui le désirent puissent librement user (§2). Les confessions ne seront pas entendues en dehors du confessionnal, à moins d’une juste cause (§3) » (CIC 1983 / c 964).
Vous aurez noté le §2 qui ouvre la voie à une autre solution que le confessionnal, et le §3 qui indique le confessionnal comme siège habituel et normal pour entendre les confessions.
Dans le Code de 1917 seules les femmes devaient impérativement être entendues au confessionnal (cf. CIC 1917 / c 909 § 1) ; dans le Code de 1983 promulgué par saint Jean-Paul II ce sont tous les fidèles qui sont concernés indistinctement.

La Conférence des évêques de France (CEF) a curieusement laissé entendre que le confessionnal ou un autre lieu étaient deux possibilités équivalentes : « Pour le lieu de la confession, tel qu’il est prévu au CIC 964 §2, l’Assemblée des évêques s’en tient aux “Variationes” du Rituel de la pénitence dans leur texte français préparé par la Commission internationale francophone : le lieu où est célébré le sacrement est important pour donner aux signes d’accueil et de pardon (absolution) toute leur valeur expressive. C’est ordinairement, sauf juste motif, une église ou un oratoire. Pour ce qui est du siège, on accordera toujours aux personnes qui viennent la liberté d’aller en un lieu visible, soit au confessionnal muni d’une grille, soit dans un local offrant la possibilité de s’asseoir et permettant un dialogue plus facile entre pénitent et prêtre : les confessions ne seront, sauf juste motif, reçues que là » (1). Vous remarquerez que les termes employés par la CEF manifestent une certaine préférence pour le « local » plutôt que pour le confessionnal. C’est dommageable parce que ce n’est pas ce que dit le Code de 1983.
Et si le confesseur veut confesser les pénitents dans un confessionnal ? La question a été posée au Saint-Siège et celui-ci a répondu que le prêtre a le droit de choisir le confessionnal comme siège où entendre les confessions, « cela même dans le cas où le pénitent demande que l’on procède autrement » (2). Cette directive a été reprise en 2002 par saint Jean-Paul II dans sa Lettre apostolique en forme de motu proprio Misericordia Dei (§ 9). Prêtres et fidèles de rite latin ont droit au confessionnal.

Les avantages du confessionnal

Le premier est l’anonymat. Les fidèles ont le droit de confesser leurs péchés sans être obligés de révéler leur identité personnelle. Dans un confessionnal, le prêtre n’est pas face au pénitent ; il ne le regarde pas et il n’est pas obligé de se tourner vers la grille pour savoir qui se présente. Il n’est pas douteux que cet anonymat peut faciliter la demande de pardon de bien des pécheurs. À l’inverse, le « local » peut en faire reculer plus d’un.
De plus, le confessionnal protège le droit de chaque fidèle (confesseur et pénitent) de défendre son intégrité et son honneur de tout danger ou soupçon. Comment, par exemple, une femme ou un homme pourraient-ils accuser un confesseur d’attouchements s’ils sont entendus dans un confessionnal muni d’une grille fixe ?
Enfin, le confessionnal permet de bien com­prendre la nature du sacrement : il ne s’agit pas d’un dialogue face à face entre un prêtre et un pénitent, mais d’une rencontre d’un pénitent agenouillé devant son Sauveur crucifié et en présence d’un ministre de l’Église. Le confessionnal a une vertu pédagogique majeure.

Éviter des dérives sexuelles

Les faits dramatiques sont connus : certains prêtres ont profité de confessions pour non seulement solliciter sexuellement leur pénitent ou pénitente, mais encore pour commettre des péchés contre le sixième commandement (3).
Il est bien évident que le confessionnal n’est pas une garantie absolue face aux sollicitations : quel que soit l’endroit choisi, un prêtre ou un pénitent déséquilibré sera toujours capable d’inciter au mal et au péché (4). En revanche, le confessionnal est une protection contre les actions peccamineuses commises lors de la célébration du sacrement : la grille fixe protège et le confesseur et le pénitent. En ce sens, le saint pape Paul VI a pu parler de « l’écran protecteur » du confessionnal (5).
C’est aussi la raison pour laquelle Benoît XVI disait à des prêtres : « il faut revenir au confessionnal, comme le lieu où célébrer le sacrement de la réconciliation, mais aussi comme le lieu où “habiter” plus souvent, afin que le fidèle puisse trouver miséricorde, conseil et réconfort, se sentir aimé et compris de Dieu et faire l’expérience de la présence de la Miséricorde divine, à côté de la Présence réelle dans l’Eucharistie » (6).
De facto, les clercs d’aujourd’hui se croient-ils plus sages et plus vertueux que ceux d’hier ? Même si le confessionnal n’est un meuble liturgique employé que depuis le XVIe siècle (7), faut-il le négliger et le mépriser de nos jours ? Sûrement pas.

Abbé Laurent Spriet

(1) Documentation catholique (DC) 86, (1989), 76.
(2) DC 95 (1998), 799.
(3) Pour ne donner que deux exemples de personnes qui ont été reconnues coupables après un procès canonique : Théodore McCarrick (ancien cardinal archevêque de Washington) et le Père Mansour Labaky.
(4) Cf. les films Léon Morin, prêtre et La Confession. Dans ces deux films il apparaît nettement que c’est davantage la pénitente que le confesseur qui est tentée de solliciter ad turpia.
(5) Audience générale du mercredi 3 avril 1974, DC 71 (1974), 404.
(6) Benoît XVI, Discours aux participants au cours sur le for interne organisé par la Pénitencerie apostolique, Salle Clémentine, 11 mars 2010.
(7) Nous devons sans doute son invention à saint Charles Borromée. Cf. R. NAZ, Dictionnaire de droit canonique, tome IV, 1949, 63.

© LA NEF n° 351 Octobre 2022, mis en ligne en juillet 2023.