Cinéma Octobre 2023

Sacerdoce

18 octobre 2023

Damien Boyer, vidéaste évangélique proche de l’Église catholique, était irrité de voir l’image des prêtres presque détruite par les scandales de pédophilie. Il a fait faire ce film sur les prêtres pour montrer qui ils étaient réellement, en choisissant des hommes jeunes pour attester qu’il ne s’agissait pas de propos périmés mais bien d’aujourd’hui.
Par un souci cinématographique naturel de spectaculaire et d’originalité, il a choisi des prêtres ayant une passion humaine outre leur engagement religieux. Paul (seuls les prénoms sont cités) est un cycliste de haut niveau, Gaspard entraîne les jeunes en haute montagne, Antoine, ancien rider, sillonne l’Ariège en caravane pour apporter l’Évangile ; Matthieu, missionnaire, n’a pas, lui, d’autre passion que la mission, mais elle le conduit dans les bas-fonds de Manille à la recherche des enfants des rues. Confirmant ces jeunes prêtres, le Père François, plus âgé, apporte son regard expérimenté, montrant que l’engagement peut être durable et en vaut la peine. Tous ces témoignages de jeunes hommes ayant choisi le célibat et la sobriété sont d’une lumière et d’une profondeur absolument enthousiasmantes et bouleversantes, radicalement opposés à la vision contemporaine ordinaire et pourtant parfaitement capables de la rejoindre. L’un aide une femme qui a glissé dans le chamanisme, l’autre dissèque avec des adolescents la pornodépendance, le troisième communique par gestes avec un petit Thaïlandais rendu aphasique par les abus sexuels… Tous se révèlent des hommes « tout donnés à tous », qu’il ne serait pas étonnant de voir suivis par quelques jeunes spectateurs de ce film sans équivalent.

L’arbre aux papillons d’or

20 septembre 2023

Thien doit rapporter la dépouille de sa belle-sœur, morte dans un accident de moto à Saïgon, dans leur village natal. Il emmène son neveu Dao, âgé de cinq ans, qui a survécu à l’accident. Dans les paysages presque surnaturels du Vietnam rural, Thien recherche le mari divorcé de la défunte, son grand frère disparu depuis des années, pour lui remettre son fils Dao.
Ce film vietnamien, le premier long métrage de son auteur, a reçu la Caméra d’Or, couronnant le meilleur premier film. Récompense méritée en même temps qu’inattendue pour un film centré sur la foi, et sur la foi chrétienne explicite, vécue par les personnages avec simplicité et ferveur. L’expression la plus spectaculaire et touchante à la fois en est la messe de funérailles qui fait honte à nos cérémonies d’enterrement furtives. Mais cet aspect spirituel se complique, au fil d’un récit aussi lent que long (trois heures !), qui brouille la lecture au point qu’on a la sensation que naturel et surnaturel se compénètrent et que, comme le dit Rimbaud, « la vraie vie est ailleurs ». Le réalisateur ne se défend pas d’avoir conçu une fin impénétrable mais il a voulu laisser les spectateurs libres de leur interprétation et cette latitude, irritante pour certains, est aussi pour l’indécision spirituelle une planche de salut.

François Maximin

© LA NEF n° 362 Octobre 2023