Possession et délivrance : deux témoignages

Témoignages de deux cheminements de délivrance, présentés par le Père Timothée Longhi, exorciste du diocèse de Bayonne.

Témoignage de Moana

Mon enfance est marquée par de grandes souffrances : quand j’avais 3 ans, j’ai perdu mon père, mort accidentellement. Par la suite, ma mère s’est livrée à une vie de débauche marquée par la drogue et une sexualité désordonnée, ne s’occupant pratiquement plus de ses enfants. Huit ans plus tard, elle a mis fin à ses jours. J’ai également été victime d’abus sexuel dès l’âge de 5 ans, et de façon régulière de 11 à 18 ans par mon grand-père maternel. Par ailleurs, j’ai été exposée très jeune au monde occulte par des amis de ma famille et j’ai eu finalement recours personnellement à l’occultisme (oui-ja, écriture automatique) pour tenter de communiquer avec mes défunts.

Je me suis mariée civilement après la naissance de ma première fille et mon mari est très vite tombé malade avec un diagnostic de sclérose latérale amyotrophique. Les médecins lui donnaient peu de temps à vivre. Du fait de cet évènement, mon oncle m’a invité à participer à une prière du Renouveau charismatique. C’est là que ma vie a basculé : positivement j’ai reçu la foi, et en même temps la guérison instantanément de mon addiction au tabac (je fumais deux paquets par jour). J’avais 33 ans. Le Christ lui-même s’est manifesté, et je lui ai consacré ma vie. Par contre, un véritable déchaînement des puissances occultes s’est manifesté : déplacements d’objets, phénomènes électriques y compris sur la télévision éteinte, bruits dans les murs, visions horribles, l’eau des robinets qui se mettaient à couler à la verticale… En fait, je n’avais pas encore abandonné mes pratiques occultes, et restais donc en correspondance avec ce monde que je croyais compatible avec ma foi nouvelle. Dans ce contexte terrible, surtout la nuit, je ne pouvais pas faire le signe de la croix : une main lourde invisible m’en empêchait. Beaucoup de malheurs arrivaient : douze fausses couches, blocages à tous niveaux, notamment matériellement et financièrement. Ma conversion s’est opérée pendant toutes ces années où j’ai dû renoncer progressivement à toutes mes pratiques occultes qui enfin s’avéraient mauvaises à mes yeux.

Grâce à mes nouveaux amis chrétiens, j’ai commencé un chemin de délivrance. Dans les premiers temps, je vivais des blocages dans les situations de dialogue ou de prière. Tout cela ne m’a pas empêché de poursuivre ma vie spirituelle par une participation quotidienne à l’office des laudes et souvent à l’eucharistie. J’ai vécu des grâces de pardon et de libération des traumatismes de l’enfance, surtout ceux liés aux viols.

Une nouvelle étape de libération

Les années ont passé avec beaucoup de difficultés : maladie de mon mari, éducation très difficile de mes trois enfants (drogue, alcool, sexualité désordonnée pour l’aînée). À une certaine période, des manifestations nocturnes reprenaient plus fortement, notamment des songes et des visions horribles. Un jour, n’en pouvant plus, je me suis adressée au Père Timothée pour demander la grâce d’une nouvelle effusion du Saint-Esprit. Au cours de cette prière, à mon grand étonnement, a été discerné un besoin d’exorcisme bien plus grave que je ne le pensais. Une nouvelle étape de libération commençait, plus difficile encore. De fait, je vivais des symptômes de possession qui se sont précisés au fur et à mesure des séances d’exorcisme, lesquelles se sont déroulées sur une période de six ans et demi. J’étais coupée de la vie, je vivais de terribles empêchements sur mes émotions et mes sens : je ne supportais plus mon entourage, je ne supportais plus la lumière, je n’avais plus d’odorat, ni de goût, je ne me lavais plus car la sensation de l’eau était terrible (et les autres sensations également), je ne mangeais plus (cela pendant un an), je ne dormais plus, j’étais habitée par une force extraordinaire. Ma vie spirituelle était complètement blo­quée (difficulté à entrer dans une église, impossibilité de prier, de recevoir l’eucharistie ou le sacrement de réconciliation).

Les séances d’exorcisme, tout du moins au début, ont été longues et rapprochées. Elles ont permis notamment de révéler au fur et à mesure les différentes problématiques de péché de ma vie et de ma famille, y compris dans les générations (rituels sataniques). Les messes de réparation ont été alors très importantes. Dans les trois jours qui suivaient les prières, je sentais en moi des jaillissements de vie, comme si des cadenas sautaient, ce qui exacerbait mes combats intérieurs ; progressivement mes sens revenaient, des déblocages s’opéraient mystérieusement, et j’avais de nouveau accès à ma conscience d’être. J’ai pu recommunier le jour de la fête du Sacré-Cœur après de longues heures d’exorcisme.

Après plus de six années de prières régulières d’exorcisme, il est apparu que je devais poursuivre personnellement un ultime chemin de délivrance par une décision intérieure qui s’avérait indispensable : il me fallait effectivement choisir la vie, malgré les embûches de mon quotidien, et travailler mon hypersensibilité ainsi que mes pensées négatives en les remettant à Dieu. L’Esprit Saint m’a vraiment guidée et m’a conduite à me remettre sous sa direction en acceptant mon état, cela pour tenter de vivre l’attitude de confiance et d’abandon de la petite voie de Thérèse de Lisieux. Quelques années après ma libération je témoigne de la puissance de Dieu, et de l’importance de choisir la vie.

Témoignage de Katia

J’étais une petite fille qui semblait ordinaire de l’extérieur, mais je me suis toujours sentie différente. J’ai grandi au sein d’une famille où de nombreux membres avaient des dons, tels que des dons de guérison (pour enlever le zona, les verrues, les brûlures), de voyance et bien plus encore… À l’âge de 10 ou 11 ans, on m’a confirmé que j’avais moi aussi des dons extrasensoriels.

Cependant, maîtriser ces capacités s’est avéré être une tâche complexe au fil des années, et plus j’en apprenais, plus leur ampleur devenait évidente. Finalement, je me suis sentie poussée de façon irrésistible à vendre mon salon de coiffure pour me consacrer totalement à la pratique du magnétisme, aux soins énergétiques, aux nettoyages de lieux, et au chamanisme… J’ai constaté que mes dons se développaient au fur et à mesure de ma pratique, et cela de façon extraordinaire. J’avais acquis une vraie renommée dans toute ma région et au-delà.

Par contre, le don de clairvoyance finissait par être tellement exacerbé que je n’arrivais plus à sortir de chez moi. J’entendais les pensées des autres en permanence. Les forces obscures, qui m’avaient tourmentée toute ma vie, devenaient comme une armée qui ne me lâchait pas, spécialement la nuit, de sorte que je ne pouvais dormir que le jour. À plusieurs reprises, j’ai senti que Satan a tenté de prendre possession de mon corps.

Par ailleurs, j’ai toujours été comme aimantée par l’Église sans toutefois la fréquenter. C’est pourquoi je me suis un jour décidée à consulter un prêtre exorciste, puis un deuxième. Mais, à mon grand étonnement, ceux-ci m’ont conseillé de poursuivre mes activités liées au magnétisme, et leurs interventions de prière n’avaient en rien amélioré ma problématique. Sur le conseil de mon compagnon, j’ai alors pris rendez-vous le Père Timothée. Après plusieurs heures de conversation, le discernement a été clair : j’ai été sacrifiée et offerte à Satan par une personne de ma famille, impliquée dans la franc-maçonnerie.

Durant cette première rencontre, j’ai compris que ma vie était marquée par la souffrance due aux dons préternaturels de ma famille et à ce sacrifice. Cette souffrance a comporté un mal-être constant, un combat perpétuel pour mener à bien toute action, des difficultés d’acceptation de ma situation, une fausse couche, des relations toxiques en nombre, des mauvaises rencontres, des embûches systématiques dans mes relations affectives, un déséquilibre émotionnel, des troubles constants du sommeil, la persécution de Satan.

Pendant cinq mois, j’ai vécu plusieurs séances d’exorcisme. Chacune d’elles était très douloureuse mais malgré cela, je ressentais un changement profond en moi : j’ai renoncé à toutes mes pratiques ésotériques et je me suis ouverte activement à la foi catholique. Je m’éloignais de Satan et me rapprochais de Jésus, avec qui j’ai commencé à dialoguer. Après quoi, tout a été très vite. J’ai retrouvé le sommeil dès la première séance, mon état physique et psychologique s’est amélioré progressivement. Je peux dire que j’ai retrouvé ma liberté. J’ai fait ma première communion à Noël, ma confirmation à la Pentecôte, et j’ai maintenant la joie de vivre la sainte messe au quotidien au sein de ma paroisse qui est très vivante.

Père Timothée longhi

© LA NEF n°363 Novembre 2023