Depuis les attentats du 13 novembre à Paris, on assiste à un déchaînement effrayant de la violence islamiste. En France même de façon récurrente maintenant, mais aussi partout dans le monde. Il ne se passe pas de semaine sans son cortège de victimes de cette nouvelle forme de barbarie. En Europe, ces drames devraient normalement soulever une question évidente : n’avons-nous pas fait fausse route en favorisant une société multiculturelle, sans chercher à maîtriser l’immigration et en abandonnant peu à peu notre modèle d’assimilation puis d’intégration ?
Cette question, visiblement, demeure encore largement taboue, quand on voit que les autorités et les médias allemands ont essayé de passer sous silence puis de minimiser les agressions sexuelles infligées, lors du nouvel an, à nombre de femmes à Cologne et dans d’autres villes d’outre-Rhin. Rien à voir avec le traitement de la photo du malheureux Aylan, mort sur une plage turque à la fin de l’été : là, sans coup férir, toute l’intelligentsia s’est élevée comme un seul homme pour appeler à un accueil inconditionnel des « réfugiés » et flétrir l’égoïsme de ceux qui osaient seulement poser une question, procédant ainsi à une culpabilisation massive des pays occidentaux !
Cette différence de traitement de l’information en dit long sur la façon dont nos élites demeurent prisonnières de l’idéologie multiculturaliste. Elles sont bien les seules, car elles n’en subissent guère les conséquences, quand le peuple modeste, exposé en première ligne, en souffre particulièrement : on retrouve ici les fameuses « fractures françaises » bien mises en lumière par Christophe Guilluy, entre une France urbaine qui profite de la mondialisation et de l’ouverture des frontières, et une « France périphérique » de plus en plus déclassée.
Ces élites n’envisagent l’homme que comme un sujet bénéficiant de droits, chaque être pouvant être substitué à un autre, quelles que soient ses origines. Le patronat allemand avait besoin de main-d’œuvre pour faire tourner ses industries – main-d’œuvre que la jeunesse locale ne suffit plus à assurer puisqu’il n’y a plus d’enfants au pays de la réussite économique ? Aussitôt Angela Merkel s’est empressée de répondre aux vœux du patronat en annonçant que son pays était prêt, en pleine crise migratoire, à recevoir 800 000 personnes ! Après Cologne, nos amis allemands commencent à réaliser que toutes les cultures ne sont pas interchangeables ou compatibles entre elles et qu’elles peuvent même donner lieu à de sévères frictions.
Cela paraît élémentaire et pourtant comment oublier que l’on nous a chantés pendant des lustres – et cela continue – les bienfaits de l’immigration et du multiculturalisme – ceux qui émettaient des réserves étant immédiatement rejetés dans la catégorie infamante des « racistes » ? La réalité est que l’immigration est quasiment toujours la conséquence d’un drame humain et que la charité comme la compassion exigeraient de faire en sorte qu’elle puisse être évitée. Ne l’oublions pas, l’immigration extra-européenne répondait certes à l’origine aux besoins du patronat, mais aussi à l’idéologie culpabilisatrice de la haine de soi et du salut par l’Autre, forcément meilleur. Dans ce dessein, il y avait donc une volonté délibérée de détruire les identités nationales et tout enracinement jugé porteur de dangers « fascistes », relisez L’idéologie française (1981) de Bernard-Henri Lévy si vous en doutez !
Ce qui se passe en France et en Europe avec la présence de fortes minorités musulmanes issues de l’immigration, qui ne cherchent en rien à s’intégrer et encore moins à s’assimiler, va-t-il enfin ouvrir les yeux de ceux qui s’aveuglent depuis trop longtemps et qui nous ont conduits là où nous sommes ?
C’est un retournement complet qui est absolument nécessaire. Alain Finkielkraut a raison, nous devons être « intransigeants sur ce que nous sommes » (1), ce qui suppose déjà de savoir ce que nous sommes et d’en avoir une légitime fierté, éloignée de tout orgueil. C’est en retrouvant notre héritage culturel – qui inclut le christianisme – et en nous appuyant sur lui que nous pourrons à nouveau envisager une véritable politique d’abord d’intégration puis d’assimilation pour ceux qui le souhaitent, nécessité vitale si nous voulons perdurer en tant que nation.
(1) Cf. notre grand entretien avec Alain Finkielkraut dans La Nef n°278, février 2016.
LA NEF n°278 Février 2016