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Il est toujours possible de célébrer la messe légalement et publiquement !

Le décret du 29 octobre 2020, rassemblant les mesures actuelles pour lutter contre l’épidémie de Covid-19, suspend-il vraiment toutes les messes publiques ?

Comme l’a confirmé le Conseil d’État dans son ordonnance du 7 novembre, le décret en vigueur pour ce deuxième confinement interdit tout rassemblement ou réunion au sein des établissements de culte, à l’exception des cérémonies funéraires (30 personnes) et des mariages (6 personnes). Les fidèles gardent la possibilité de se rendre dans un lieu de culte, y compris à plus d’un kilomètre de leur domicile et pendant plus d’une heure.

Cette interdiction laisse peu de marge à l’Église catholique pour maintenir les messes paroissiales. Quelques solutions légales existent toutefois, mais requièrent réflexion et organisation.

Messes de requiem et messes « fortuites »

Certaines paroisses organisent publiquement des messes de requiem avec trente fidèles, en l’absence du corps du défunt. Ces messes offertes pour l’âme de défunts sont autorisées par le décret du 29 octobre et peuvent donc être multipliées. Dans les paroisses privilégiant la forme extraordinaire du rite romain, cette liturgie pour les défunts est déjà habituelle, en semaine. Elle fait partie des messes dites « votives », que l’on peut retrouver dans les missels traditionnels.

Mgr Aillet, évêque de Bayonne, a quant à lui déclaré que « Rien n’empêche les prêtres de célébrer la messe dans les lieux de culte qui restent ouverts et rien n’empêche les fidèles d’entrer dans les églises individuellement. C’est l’organisation de cérémonies religieuses qui est suspendue… ». Autrement dit, les paroisses ne peuvent pas légalement maintenir l’organisation de messes, mais lorsqu’un prêtre célèbre sa messe (privée), les fidèles présents dans l’église peuvent y rester.

Des messes en plein air déclarées à la préfecture

Une autre solution légale, qui pourrait être expérimentée dès dimanche prochain, serait de célébrer la messe sur la voie publique. Une telle démarche s’inscrirait dans les pas de saint Charles Borromée, qui était évêque de Milan lorsque la ville italienne était confinée en raison de la peste de 1576. Le prélat, célébré par l’Église la semaine dernière (4 novembre), avait opté pour la célébration quotidienne de messes en plein air.

Pendant l’actuel confinement, les messes sur la voie publique seraient déclarées à la préfecture du lieu, en tant que manifestation. En effet, les manifestations restent autorisées actuellement, dans la limite de 5000 personnes. De plus, aucune disposition législative ou réglementaire n’interdit de pratiquer un culte sur une place publique, dans le cadre d’une manifestation. La condition fixée par le décret du 29 octobre est que les organisateurs prévoient des mesures pour assurer le respect des règles sanitaires.

Des messes en plein air n’ont pas encore été célébrées depuis la Toussaint. En revanche, des groupes de catholiques ont organisé des prières publiques, déclarées en préfecture. Par exemple, des centaines de catholiques se sont rassemblées le dimanche 8 novembre à 10h30 devant la cathédrale de Nantes pour prier le chapelet et demander à Dieu le retour de la liberté du culte catholique en France. Leur prière en plein air avait été autorisée par la préfecture et témoigne du fait que les manifestations cultuelles publiques sont légales.

Les attestations à signer pour de tels déplacements

Reste à savoir comment justifier de tels déplacements, car, que ce soit pour se rendre dans une église ou à une manifestation publique, l’attestation prévue par le ministère de l’Intérieur n’inclut aucune case à cocher dédiée. Pour se rendre à un lieu de culte, le gouvernement a proposé aux fidèles de cocher pour le moment la case « motif familial impérieux », dans l’attente des changements sur l’attestation demandés par le Conseil d’État. Il en irait de même pour la participation à une manifestation publique.

Cela dit, le décret du 29 octobre ne rend pas obligatoire le modèle d’attestation du ministère de l’Intérieur. Il impose uniquement aux personnes en dehors de leur domicile d’avoir un « document leur permettant de justifier que le déplacement considéré entre dans le champ de l’une de ces exceptions ». Pour cette raison, des juristes chrétiens ont fait circuler des attestations alternatives de déplacement dérogatoire, indiquant que l’on se rend dans un lieu de culte ouvert ou à une manifestation publique déclarée.

Nicolas Bauer

Nicolas Bauer est membre de ECLJ (European Center for Law and Justice) : www.eclj.org

© LA NEF le 9 novembre 2020, exclusivité internet