Messe tridentine © Priestly Fraternity of Saint Peter-Commons.wikimedia.org

Consultation des évêques sur le motu proprio Summorum Pontificum

La Congrégation pour la Doctrine de la foi (CDF) a lancé en avril 2020 une enquête auprès des évêques sur l’application de Summorum Pontificum (2007) dans leur diocèse, motu proprio régissant la célébration de la messe selon la forme extraordinaire du rite romain. Cette enquête était basée sur un questionnaire détaillé envoyé à tous les évêques qui devaient y répondre et l’adresser à Rome. Or, au lieu de suivre cette démarche, la Conférence des évêques de France (CEF) a réalisé une « synthèse des résultats » en une dizaine de pages. Une synthèse n’a rien d’absurde pour aider la CDF à condition que cette dernière reçoive également les rapports respectifs de chaque évêque français, tant une synthèse ne peut couvrir toute la réalité des diocèses dans leur diversité. Mais surtout une telle synthèse n’a de sens que si elle reflète fidèlement l’esprit de la multitude des rapports épiscopaux : est-ce le cas ? À vrai dire nous l’ignorons, mais ce que nous savons de certains rapports épiscopaux apparaît peu présent dans ce texte qui tend à uniformiser les positions. Et surtout le ton général est condescendant à l’égard du monde « traditionaliste », forcément composé de chrétiens égarés qu’il convient de remettre sur le droit chemin – ton que l’on espérait appartenir au passé.

Ce monde « traditionaliste » n’est certes pas sans défaut et la synthèse de la CEF en épingle quelques-uns qui sont bien réels (tendance à l’entre-soi, faiblesse du dynamisme missionnaire, refus de la concélébration pour certains) ; d’autres le sont beaucoup moins (atteinte à l’unité, contestation de Vatican II… sauf quelques cas, tout cela n’est plus actuel). Et rien n’est dit des nombreuses vocations qu’il suscite, du rayonnement de ses abbayes ni de sa diversité. Mais le plus grave est que, excepté un endroit où il est révélé que les messes en forme extraordinaire sont surtout promues « par de jeunes familles nombreuses », il ne ressort aucune empathie pour ces fidèles catholiques. À aucun moment, l’auteur de la synthèse n’a l’idée qu’ils apportent une véritable richesse à l’Église et qu’il conviendrait donc de les accueillir beaucoup plus chaleureusement, plutôt que de les considérer comme des croyants de second plan que l’on tolère en espérant les voir évoluer. La liste des « aspects positifs / négatifs » de l’usage de la forme extraordinaire est caricaturale tant elle est unilatérale, ce qui manifeste combien l’instance bureaucratique de la CEF s’est peu interrogée sur l’enrichissement que cette forme pourrait apporter à la liturgie en forme ordinaire, ainsi que Benoît XVI l’avait suggéré en 2007.

L’auteur de la synthèse se plaint que, entre adeptes des deux formes liturgiques, ce sont « deux mondes qui ne se rencontrent pas » : selon notre expérience, cela est loin d’être général ! À La Nef, cela fait trente ans que nous faisons se rencontrer ces « deux mondes », et cela se passe très bien, nous sommes tout prêts à en témoigner auprès des évêques que cela pourrait intéresser.

Christophe Geffroy

© LA NEF n°333 Février 2021